Descartes

Étymologiquement, « morale » vient du latin « moralis » et désigne ce qui a trait aux mœurs, au caractère, aux attitudes humaines en général et, en particulier, aux règles de conduite. Tout en distinguant l’éthique de la morale, les éthiciens contemporains, à l’image de Dominique Folscheid et Jean-François Mattéi, s’accordent à dire que la langue française emploie le terme d’origine latine(moralis) pour désigner ce qui est lié à la pratique, et le terme d’origine grecque (éthikè) pour définir la théorie de cette pratique. En ce sens, il y aurait des morales particulières et une éthique qui prendrait plus systématiquement en charge l’exigence d’universalité propre à la morale. Dans le langage actuel, la morale a pris un petit goût de vieux. Les acteurs des sociétés démocratiquescontemporaines préfèrent parler d’éthique que de morale. On accepte mal qu’on nous fasse la morale ; mais on comprend mieux que l’on nous rappelle des exigences éthiques. Mais quoi qu’il en soit, « le souvenir du fruit défendu, fait remarquer Bergson, est ce qu’il y a de plus ancien dans la mémoire de chacun de nous, comme dans celle de l’humanité ». C’est dire que la morale apparaît légitimement, voirenaturellement comme ce système de règles que l’homme suit ou doit suivre dans sa vie aussi bien personnelle que sociale. Il n’existe et il n’a jamais existé une société humaine sans règles morales. Toute entreprise humaine est nécessairement soumise à la question de savoir si elle est admissible ou répréhensible, en accord avec les valeurs reconnues ou en contradiction avec elles. Pourtant, nosrègles de conduite et les actions qui en émanent ne sont pas les mêmes pour différents individus, époques, civilisations et sociétés. La question se pose alors de savoir qu’est-ce qui caractérise essentiellement la morale ? Autrement dit, qu’est-ce qui fait la spécificité de la règle morale ? D’où émane l’obligation morale ? Mieux, quel est le fondement de la morale ?

I / APPROCHE PHILOSOPHIQUEDES FAITS MORAUX.
Le constat est sans équivoque : toutes les communautés humaines possèdent des règles de vie et savent distinguer le bien du mal (règles de mariage, de distinction entre nourritures permises, interdites et prescrites au cours de certaines cérémonies, etc.). Peut-on dans cette situation distinguer le vrai bien et la vraie morale du faux bien et de la fausse morale ? Existe-t-il desfaits moraux universels ? Autrement dit, existe-t-il une morale absolument vraie et universelle qui obligerait tous les êtres humains ? Pourquoi tel type de morale se rencontre ici, tel autre là ? Quels facteurs font que des groupes vivant dans des conditions similaires suivent des règles qui ne se ressemblent pas ? Pourquoi y a-t-il évolution du code moral dans la même communauté ?A / MORALE ET SOCIÉTÉ
La morale se présente d’abord comme « morale du groupe ». Il n’y a que les membres de la « cité » qui, se tenant comme les cellules d’un organisme, introduisent parmi eux une discipline qui fonde leur solidarité et leur unité. La vie sociale est un système d’habitudes ou de règles fortement enracinées en chacun de nous et dont l’objectifest de maintenir l’ordre social. « Nous sommes, écrit Henri Bergson, en continuité avec les autres personnes, semblables à elles, unis à elles par une discipline qui crée entre elles et nous une dépendance réciproque. » Mais le conflit éclate nécessairement lorsque nos valeurs morales rencontrent celles d’autres sociétés. Tant que notre système moral n’entretient aucun rapport avec les autressystèmes, tout se passe bien. Mais dès que la rencontre s’opère, naît l’inévitable conflit des cultures et des valeurs (voir notre article, « La société entre conflit et espoir », in Éthiopique, www.ethiopiques.refer.sn/éthiopiques).
Dans ce conflit, diverses actions et réactions sont possibles :
– Destruction de l’un des adversaires et donc de ses valeurs morales.
– Reconnaissance mutuelle des…