Otto DIX, La Guerre, 1929-1932 Otto DIX, La Guerre, 1929-1932(panneau central 204×204 cm, panneaux de côté 204×102 cm)
dix otto la guerre 1929
INTRODUCTIONLa Guerre est une oeuvre d’Otto DIX, peintre allemand, engagé volontaire au début du conflit de la première guerre mondiale et qui en revient révolté et pacifiste. Cette oeuvre est donc celle d’un homme qui a vécu l’horreur et l’inhumanitéde la « Grande Guerre » et qui témoigne de son expérience de soldat en représentant un champ de bataille où la mort et la cruauté règnent en maîtres.Otto DIX réalise La Guerre entre 1929 et 1932 c’est à dire plus de dix ans après l’armistice, à une période où les idées nationalistes trouvent de nouveau une place en Allemagne et où les gens commencent à oublier les terribles souffrances apportées parla guerre. C’est dans ce contexte particulier que le peintre réalise cette oeuvre afin de rappeler l’extrême brutalité et la sauvagerie vécues pendant le conflit.Cette oeuvre composée de trois panneaux principaux est appelée triptyque*, elle rappelle la forme des retables** de la Renaissance que le peintre n’a pas choisie par hasard puisqu’il évoque avec son triptyque une oeuvre majeure de laRenaissance : Le retable d’Issenheim de Mathias GRÜNEWALD.Retable_Issenheim_details.jpgDans le retable d’Issenheim (détails reproduits ci-contre) il est aussi question de mort et de souffrance puisque le panneau central de celui-ci est la représentation d’une crucifixion (c’est à dire du Christ sur la croix) que GRÜNEWALD choisit de peindre sans rien voiler de la déchéance du corps crucifié : corpsamaigri, déformé, creusé par la douleur, chairs grises et meurtries par les clous, sang, pustules. Ainsi, en utilisant la forme du triptyque Otto DIX cite très directement le retable d’Issenheim et par cette évocation ajoute une strate d’horreur à l’horreur déjà représentée dans son oeuvre.*Triptyque : oeuvre en trois parties**Retable : Dans une église, tableau placé sur un autel et sur lequel sontreprésentés les épisodes de la vie du Christ et des saints. C’est à la Renaissance que le retable peint fait son apparition (il peut également être sculpté).***Prédelle : C’est la partie inférieure du retableDESCRIPTIONI. Les éléments iconiques (ce qui est représenté)Panneau de gauche : des soldats en armes portant sac au dos (il est possible d’identifier là les armes et l’uniforme portés par lespoilus) tournent le dos au spectateur et marchent dans la brume, ainsi ils forment une armée humaine sans visage et sans identité, masse aveugle avançant d’un même pas vers le front et ses atrocités.Panneau central : Alors qu’aucun décor n’est représenté dans le panneau de gauche, l’arrière plan du panneau central est occupé par la représentation de ruines : restes de maisons écroulées oucalcinées, paysage désertique au sein duquel aucune trace de présence humaine ne subsiste, évocation des ravages causés par les bombardements (Cf. Verdun). Au premier plan c’est la tranchée dans toute son horreur et son inhumanité qui est évoquée : (en bas à droite) amoncellement de corps déchiquetés et éviscérés (bombardements) surplombé par un cadavre aux yeux vides, à la bouche ouverte d’où jaillit unvers et à la peau parsemée de pustules qui évoquent tout à la fois le Christ de Mathias GRÜNEWALD mais aussi les conditions d’hygiène abominables dans lesquelles ont vécu les poilus dans les tranchées (maladies, épidémies). Ce cadavre tend une main, tentative désespérée d’obtenir de l’aide dans un univers d’où l’humanité a disparu, son appel à l’aide reste suspendu dans le vide. Au dessus de cetamas de viscères et de corps flotte un squelette embroché sur un résidu d’architecture (citation indirecte du christ crucifié) et qui désigne de son doigt la mort et la barbarie qui s’entassent plus bas. Quasiment invisible, à gauche de l’image un unique survivant assiste à la scène, statufié par sa cape qui le prive de ses bras (et donc de toute action), visage et regard dissimulés sous son…