La question de l’intégration sociale dans les programmes de lutte

Abdelaziz Adidi

La question de l’intégration sociale dans les programmes de lutte contre l’habitat insalubre au Maroc Abdelaziz ADIDI Mots clés : Bidonville – Habitat insalubre – Habitat non réglementaire – Habitat social – Maîtrise d’ouvrage sociale – Stratégie d’intervention La croissance démographique, le fort mouvement d’exode rural consécutif aux années de sécheresse, la faiblesse de lacapacité d’intégration des villes marocaines, la faiblesse du pouvoir d’achat d’une frange importante de la population, l’inadéquation entre l’offre et la demande en logements, l’épuisement des réserves foncières, la complexité des régimes fonciers et de la fiscalité immobilière, l’absence d’une stratégie cohérente d’intervention dans le domaine de l’habitat, la faiblesse juridique des documentsd’urbanisme, etc. sont autant de facteurs explicatifs de l’explosion du phénomène de l’habitat non réglementaire au Maroc. Aujourd’hui, après 50 ans d’indépendance, la situation reste toujours préoccupante. Les logements d’une insalubrité totale et nécessitant un réaménagement voire même une destruction représentent 11,5 % du parc, soit 348 000 unités. Les logements vacants (12 %) et à usageprofessionnel (10 %) représentent presque le quart du parc marocain, répartis entre Agadir, Tanger, Rabat et Casablanca. Bien que jeune – moins de 70 % des constructions datent de moins de 30 ans ce parc n’a pas été entretenu et présente de nombreuse insuffisances notamment au niveau des structures et de l’étanchéité. Le rythme de construction en habitat insalubre augmente chaque année de quelques 40 000unités dont 15 000 en bidonvilles. Plus de la moitié des bidonvilles se situe sur l’axe Kénitra-Safî. Casablanca en abrite à elle seule 25 %, construits sans autorisation en dehors et à l’intérieur de la ville, sans compter les « transformations » des habitations des médinas qui deviennent de véritables chantiers la nuit et les jours fériés ! Ces constructions réalisées hors normes techniques et/oude sécurité (nombre d’étages supérieurs aux normes imposées, trafic dans les matériaux de construction) ont eu pour conséquence de nombreux effondrements.

Abdelaziz Adidi

Avant 1980 % la prédominance de l’approche hygiéniste Dès le début, les services de l’habitat ont focalisé leur attention sur le bidonville qui commençait à se développer d’une façon spectaculaire au milieu des années 30.En 1940, on dénombre pour la seule ville de Casablanca 50 000 bidonvillois, en 1950, 1960 et 1970 ils sont respectivement 100 000, 160 000 et 250 000. La création de l’Office chérifien de l’Habitat en 1944, on assiste aux premières opérations de recasement des bidonvilles mais ne réalisant que des actions ponctuelles d’intérêt local qui ne pouvait avoir qu’un impact réduit sur les problèmes poséspar l’extension de l’habitat insalubre. En 1946, des programmes de grande envergure vont être conçus et réalisés ; constatant que « pendant 35 ans on a oublié les Marocains », Ecochard, l’architecte urbaniste du Protectorat substitue aux conceptions culturalistes de la période Prost (lui même architecte urbaniste ), un habitat quantitatif, tourné vers le grand nombre. Pour une meilleure utilisationEcochard opte pour un système de lots de 8 x 8 mètres, permettant l’organisation optimale de « 2 pièces habitables obligatoirement orientées vers le Sud et l’Est et une cuisine, le tout disposé autour d’une cour. » Durant les années cinquante et soixante, les actions en matière de résorption des bidonvilles étaient dotée d’une vision hygiéniste urbaine, héritée de la colonisation qui considérait lebidonville comme synonyme de saleté et source de toutes les nuisances urbaines. Cette vision consistait en une politique de démolition des implantations et de transfert des ménages dans des cités de recasement à la périphérie des villes, sur des sites aménagés en trames avec des degrés d’équipement variable, allant du point d’eau et WC publics, au logement sommaire construit sur un lot…