L’affiche rouge

Le contenu de l’affiche
L’affiche, dont l’image figure ci-contre, comprend :
* un slogan : « Des libérateurs ? La Libération ! Par l’armée du crime » ;
* les photos, les noms et les actions menées par dix résistants du groupe Manouchian :
* « Grzywacz – Juif polonais, 2 attentats »,
* « Elek – Juif hongrois, 8 déraillements »,
* « Wajsbrot – Juif polonais, 1attentat, 3 déraillements »,
* « Witchitz – Juif polonais, 15 attentats »,
* « Fingerweig – Juif polonais, 3 attentats, 5 déraillements »,
* « Boczov – Juif hongrois, chef dérailleur, 20 attentats »,
* « Fontanot – Communiste italien, 12 attentats »,
* « Alfonso – Espagnol rouge, 7 attentats »,
* « Rajman – Juif polonais, 13 attentats »,
* « Manouchian –Arménien, chef de bande, 56 attentats, 150 morts, 600 blessés » ;
* six photos d’attentats ou de destructions, représentant des actions qui leur sont reprochées.
La mise en page marque une volonté d’assimiler ces dix résistants à des terroristes : la couleur rouge et le triangle formé par les portraits apportent de l’agressivité ; les six photos en bas, pointées par le triangle, soulignentleurs aspects criminels. Le nom de Wolf Wajsbrot est mal composé (Wasjbrot).
La Bibliothèque nationale de France conserve trois exemplaires de l’affiche dans trois formats différents dont les formats 152 x 130 cm, et 118 x 75 cm1.
L’affichage partout dans Paris fut accompagné par la diffusion large d’un tract reproduisant :
* au recto, une réduction de l’affiche rouge ;
* au verso, unparagraphe de commentaire fustigeant « l’Armée du crime, contre la France »2.
Les dimensions de ce tract sont de 22 x 26 cm3.
La diffusion en France
Certains auteurs parlent d’une diffusion dans toute la France, par exemple Philippe Ganier-Raymond écrit en 1975 que « les murs de France se couvraient de quinze mille affiches »4, Claude Lévy, en 1979, que l’affiche « apparaissait sur les murs des pluspetits villages de France »5, et la plaquette de l’exposition Manouchian tenue à Ivry en 2004, affirme que celle-ci fut « largement placardée sur les murs des villes et des villages français »6, ce qui n’est guère différent du tract de mars 1944 de l’Union des Juifs pour la Résistance et l’Entraide qui parle d’un affichage « sur les murs de toutes les villes et villages de France »7, mais qui,pris à la lettre, constituerait un tirage supérieur à 15 000 exemplaires.
L’affiche a été vue à Paris8, à Nantes9, et à Lyon10.
L’histoire de l’affiche rouge

Document d’archive allemand, indiquant les noms des condamnés et le verdict.
L’affiche aurait été placardée au moment du procès des 23 membres du groupe Manouchian, affilié aux Main-d’œuvre immigrée. Pour Stéphane Courtois, DenisPeschanski et Adam Rayski, elle est placardée avant l’ouverture du procès, entre le 10 et le 15 février 194411, mais pour Michel Wlassikoff, elle est placardée à partir du lendemain de l’exécution, le 22 février12.
Pour Adam Rayski, l’existence d’un procès public, et l’allégation que les accusés auraient comparu dans une salle d’audience dans un grand hôtel parisien, est un « énorme mensonge de lapropagande allemande et vichyssoise »13.
La chronologie proposée par Philippe Ganier-Raymond est tout autre : pour lui la séance de photographies et de tournage cinématographique à partir de laquelle a été constituée l’affiche a eu lieu le matin du 21 février et l’affiche est parue « un mois plus tard »14, c’est-à-dire « dans les premiers jours d’avril 1944 »4. Mais cette chronologie est plus difficileà concilier avec la date du 11 février 1944, que l’Institut national de l’audiovisuel donne au document cinématographique « Deuil et appel à la répression après des attentats “terroristes”/ Obsèques de trois gardes du GMR »15, ainsi qu’avec les parutions clandestines qui mentionnent explicitement l’affiche rouge relativement tôt : le no 14 de mars 1944 des Lettres françaises11 et le tract…