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Inégalités : faits et débats
Pierre-Noël Giraud
Article publié dans Sociétal numéro 35, 1er trimestre 2002
Inégalités : faits et débatsPierre-Noël Giraud
Le débat sur les inégalités et sur le rapport entre mondialisation et inégalités, encore confidentiel au milieu des années 90, s’amplifie régulièrement depuis. Qu’entend t-on par inégalités et peuton les mesurer de manière rigoureuse ? Les inégalités économiques sont-elles croissantes ? La mondialisation est-elle coupable de l’accroissement de certaines inégalités ? Lesquelleset par quels mécanismes ? Ou bien sont-ce les technologies de l’information ? Ou encore les modifications de l’organisation des entreprises et des marchés du travail ? Existe-t-il un lien entre inégalités et croissance ? L’inégalité, en particulier dans le Tiers Monde, entrave-t-elle le rattrapage et faut-il donc s’en soucier, ou suffit-il d’y combattre la pauvreté ? Ces questions font désormaisl’objet de nombreuses études, empiriques et théoriques, qui permettent de clarifier quelque peu les termes d’un débat qui s’amplifie, en particulier avec la montée en puissance des mouvements « anti-mondialisation libérale »
Inégalités économiques, de quoi parle-t-on ?
On doit considérer trois types d’inégalités économiques. Les inégalités entre pays, mesurées par les écarts entre indicateurs deniveaux de vie moyens (PIB par habitant calculés au taux de change de parité de pouvoir d’achat, par exemple). On les appellera inégalités internationales. Les inégalités internes à chaque pays dont une mesure simple, parmi bien d’autres, est par exemple l’écart entre les revenus moyens de 10 % les plus riches et des 10 % les plus pauvres dans le pays. D’autres mesures plus synthétiques sont lescoefficients de Gini ou de Theil1. L’inégalité « mondiale », où l’on considère la population mondiale comme un tout, et que l’on mesure de la même manière que l’inégalité interne à un pays. Ce dernier type d’inégalité est évidemment la résultante des deux premiers.
L’histoire longue des inégalités
Bourguignon et Morrisson se sont livrés à une compilation des données disponibles pour la période1820-1992. Leur article, à paraître dans American Economic Review, a circulé sous forme de document de travail de la Banque Mondiale et déjà fait l’objet de nombreux commentaires. Les données chiffrées sont résumées par le graphique 1. Le résultat principal est que l’inégalité mondiale est presque exclusivement déterminée par l’inégalité internationale, période 1910-1950 mise à part. Elle croîtrapidement entre 1820 et
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Ces deux outils de statistique descriptive mesurent « l’inégalité » d’une distribution, de revenus par exemple. Ils varient tous deux entre 0 et 100 (ou entre 0 et 1, selon les présentations). O signifie une distribution uniforme (égalité complète) et 100 la plus extrême inégalité.
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1910, stagneentre 1910 et 1950 en raison d’une forte réduction des inégalités internes, reprend sa progression à partir de 1950, mais à un rythme moindre, car l’inégalité internationale croît moins vite qu’entre 1820 et 1910.
Graphique 1 : Les inégalités depuis 1820 selon Bourguignon et Morrisson
Source : Bourguignon, F. and C. Morrisson, « The size distribution of income among world citizens: 1820-1990 »,World Bank, A paraître dans l’American Economic Review. Cependant, la plupart des commentaires de ces résultats affirment que la mondialisation n’est pas la cause de la croissance des inégalités internationales et donc mondiales. C’est la différence de rythme du progrès technique qui le serait. Nous sommes donc renvoyé au vaste débat sur la raison de l’avance scientifique et technique prise par…