Émile Durkheim
Fondateur de la sociologie
(1894)
“Qu’est-ce qu’un fait social ?”
Un document produit en version numérique par Jean-Marie Tremblay, bénévole, professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi Courriel: [email protected] Site web pédagogique : http://www.uqac.ca/jmt-sociologue/ Dans le cadre de: « Les classiques des sciences sociales » Une bibliothèque numériquefondée et dirigée par Jean-Marie Tremblay, professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi Site web: http://classiques.uqac.ca/ Une collection développée en collaboration avec la Bibliothèque Paul-Émile-Boulet de l’Université du Québec à Chicoutimi Site web: http://bibliotheque.uqac.ca/
Émile Durkheim, “Qu’est-ce qu’un fait social ?” (1894)
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Cette édition électronique a été réalisée parJean-Marie Tremblay, bénévole, professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi à partir de :
Émile Durkheim “Qu’est-ce qu’un fait social ?” Un article publié dans Les règles de la méthode sociologique. Paris : Félix Alcan, Les Presses universitaires de France, 1894, 1re édition. Extrait du chapitre premier.
Polices de caractères utilisée : Pour le texte: Times New Roman, 14 points. Pour lescitations : Times New Roman, 12 points. Pour les notes de bas de page : Times New Roman, 12 points. Édition électronique réalisée avec le traitement de textes Microsoft Word 2004 pour Macintosh. Mise en page sur papier format : LETTRE (US letter), 8.5’’ x 11’’) Édition numérique réalisée le 9 août 2007 à Chicoutimi, Ville de Saguenay, province de Québec, Canada.
Émile Durkheim, “Qu’est-ce qu’unfait social ?” (1894)
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Émile Durkheim “Qu’est-ce qu’un fait social ?” Un article publié dans Les règles de la méthode sociologique. Paris : Félix Alcan, Les Presses universitaires de France, 1894, 1re édition. Extrait du chapitre premier.
Avant de chercher quelle est la méthode qui convient à l’étude des faits sociaux, il importe de savoir quels sont les faits que l’on appelle ainsi. Laquestion est d’autant plus nécessaire que l’on se sert de cette qualification sans beaucoup de précision. On l’emploie couramment pour désigner à peu près tous les phénomènes qui se passent à l’intérieur de la société, pour peu qu’ils présentent, avec une certaine généralité, quelque intérêt social. Mais, à ce compte, il n’y a, pour ainsi dire, pas d’événements humains qui ne puissent êtreappelés sociaux. Chaque individu boit, dort, mange, raisonne et la société a tout intérêt à ce que ces fonctions s’exercent régulièrement. Si donc ces faits étaient sociaux, la sociologie n’aurait pas d’objet qui lui fût propre, et son domaine se confondrait avec celui de la biologie et de la psychologie. Mais en réalité, il y a dans toute société un groupe déterminé de phénomènes qui se distinguentpar des caractères tranchés de ceux qu’étudient les autres sciences de la nature. Quand je m’acquitte de ma tâche de frère, d’époux ou de citoyen, quand j’exécute les engagements que j’ai contractés, je remplis des devoirs qui sont définis, en dehors de moi et de mes actes, dans le droit et dans les mœurs. Alors même qu’ils sont d’accord avec mes
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sentiments propres et que j’en sens intérieurement la réalité, celle-ci ne laisse pas d’être objective ; car ce n’est pas moi qui les ai faits, je les ai reçus par l’éducation. Que de fois, d’ailleurs, il arrive que nous ignorons les détails des obligations qui nous incombent et que, pour les connaître, il nous faut consulter le Code et ses interprètes autorisés ! De même, lescroyances et les pratiques de sa vie religieuse, le fidèle les a trouvées toutes faites en naissant ; si elles existaient avant lui, c’est qu’elles existent en dehors de lui. Le système de signes dont je me sers pour exprimer ma pensée, le système de monnaies que j’emploie pour payer mes dettes, les instruments de crédit que j’utilise dans mes relations commerciales, les pratiques suivies dans ma…