Longue vie au Web, par Tim Berners-Lee « Sir » Tim Berners-Lee, le père du Web, a livré ce week-end au magazine Scientific American, une analyse complète lucide et accessible des menaces qui pèsent aujourd’hui sur ce curieux phénomène qui depuis vingt ans a changé la face du monde : Internet. En termes simples, Berners-Lee revient sur l’universalité de ce réseau, qui n’a pu se développer quegrâces à des conditions initiales propices : Une technique simple et libre, donc bidouillable par chacun dans son coin; Une conception décentralisée, permettant une croissance tous azimuts; Le principe de neutralité du réseau, qui permet à tous de proposer du contenu. Or, force est de constater que ces conditions, qui ont démarqué ce que nous appelons aujourd’hui « Internet » des autres tentatives demise en réseau à grande échelle d’ordinateurs de par le monde, sont attaquées et mises en péril par de grandes entreprises, et, presque comme une conséquence par de nombreux gouvernements. [1] À la lecture de ce texte, on peut également se rendre compte que la France est malheureusement en bonne position parmi les gouvernements les plus hostiles au réseau, et que la HADOPI, comme un pavé jeté dansla mare, éclabousse effectivement de honte le pays des droits de l’Homme face à ses voisins. Contrastant par exemple clairement avec le droit au haut débit pour tous mis en place par la Finlande et lui aussi mentionné par Berners-Lee. Toutefois, la principale qualité de cette riche synthèse est son ton résolument grand public, qui a mobilisé l’équipe Framalang tout un week-end pour venir à bout dela traduction des 6 pages de l’article original en moins de 48h. Le Web est un enjeu crucial non seulement pour la révolution numérique mais aussi pour notre prospérité — et même pour notre liberté. Comme la démocratie elle-même, il doit être défendu. Le world wide web est venu au monde, concrètement, sur mon ordinateur de bureau à Genève en Suisse en décembre 1990. Il était composé d’un site Webet d’un navigateur, qui d’ailleurs se trouvaient sur la même machine. Ce dispositif très simple faisait la démonstration d’une idée fondamentale : n’importe qui pouvait partager des informations avec n’importe qui d’autre, n’importe où. Dans cet esprit, le Web s’est étendu rapidement à partir de ces fondations. Aujourd’hui, à son 20ème anniversaire, le Web est intimement mêlé à notre vie de tousles jours. Nous considérons qu’il va de soi, nous nous attendons à ce qu’il soit disponible à chaque instant, comme l’électricité. Le Web est devenu un outil puissant et omniprésent parce qu’il a été conçu suivant des principes égalitaires et parce que des milliers d’individus, d’universités et d’entreprises ont travaillé, à la fois indépendamment et ensemble en tant que membres du World Wide WebConsortium, pour étendre ses possibilités en se fondant sur ces principes. Le Web tel que nous le connaissons, cependant, est menacé de diverses façons. Certains de ses plus fameux locataires ont commencé à rogner sur ses principes. D’énormes sites de réseaux sociaux retiennent captives les informations postées par leurs utilisateurs, à l’écart du reste du Web. Les fournisseurs d’accés à Internetsans fil sont tentés de ralentir le trafic des sites avec lesquels ils n’ont pas d’accords commerciaux. Les gouvernements — qu’ils soient totalitaires ou démocratiques — surveillent les habitudes en ligne des citoyens, mettant en danger d’importants droits de l’Homme. Si nous, les utilisateurs du Web, nous permettons à ces tendances et à d’autres encore de se développer sans les contrôler, le Webpourrait bien se retrouver fragmenté en archipel. Nous pourrions perdre la liberté de nous connecter aux sites Web de notre choix. Les effets néfastes pourraient s’étendre aux smartphones et aux tablettes, qui sont aussi des portails vers les nombreuses informations fournies par le Web.
Pourquoi est-ce votre affaire ? Parce que le Web est à vous. C’est une ressource publique dont vous, vos…