INTRODUCTION
« Les termes qui jouissent de la faveur des protagonistes du débat public tendent à éveiller les soupçons des universitaires. Le sort de la « gouvernance » est exemplaire à cet égard, ce qui […] reflète à la fois la méfiance à l’égard d’un anglicisme et, dans le cadre même du débat public, certaines préventions idéologiques. À mesure que l’usage du mot se banalise, il semblede plus en plus incertain que l’on ait affaire à un concept ; et, de fait, nombreux sont les spécialistes qui proposent de s’en débarrasser tout à fait ».
John Crowley, « Usages de la gouvernance et de la gouvernementalité », in Critique internationale, n° 21, octobre 2003, pp. 52-61.
Les mutations rapides des relations internationales redéfinissent la place de l’Afrique dans le monde. Eneffet, tout semble indiquer que la mondialisation et son corollaire l’intégration dans le commerce mondial, au lieu de profiter à l’Afrique la fragilisent davantage en maintenant sa dépendance via une division internationale du travail héritée de la période coloniale. Cette interconnexion est largement perceptible dans l’impact de la crise financière mondiale sur les sociétés africaines. Ce quiest de nature à faire voler en éclat les acquis démocratiques et économiques de l’Afrique. Et, ce n’est pas par hasard que nombre d’analystes plaident pour la mise en place d’une nouvelle gouvernance africaine.
Force est de constater que l’Afrique, dont la part dans le commerce mondial ne cesse de décliner, continue à attirer non pas grâce à ses performances économiques et l’améliorationdu climat des affaires, mais de par les ressources qu’elle contient, qui restent à l’état latent en raison de l’absence d’un régime d’accumulation interne. Cette latence des ressources fait de l’Afrique un objet de convoitise entre puissances économiques.
Paradoxalement, le continent regorge de ressources naturelles et minières, dont la quantité va diminuant au fil des ans, à cause d’uneexploitation inconsidérée. Aujourd’hui l’Afrique est plus que jamais l’objet d’enjeux stratégiques et politiques importants : Chine/USA/Europe/Japon). Toutefois, la question d’un ordre mondial plus juste pour l’Afrique est plus que jamais d’actualité. De ce point de vue, le sommet Amérique du Sud- Afrique (ASA) ainsi que le passage du G8 au G20 par l’intégration des pays émergents (Chine, Brésil,Afrique du Sud…etc.) témoignent du besoin de refonder de nouvelles formes de gouvernance mondiale.
Par ailleurs, les multinationales en tant qu’acteurs de la mondialisation ne cessent de lorgner l’Afrique en raison de son potentiel de ressources. Ainsi, l’approvisionnement en ressources aiguise la concurrence que se livrent les puissances économiques via leurs multinationales. Dans cesconditions, la diversité des concurrents et dans sa suite, la diversité des gouvernances diplomatiques, nous mettent au centre de nouveaux enjeux où des substituts en matière de politiques économiques à suivre peuvent exister. Ce constat trouve sa pleine illustration dans le contraste entre les politiques étrangères des puissances en Afrique.
D’un côté, certaines puissances acquises aulibéralisme fondent leur présence en Afrique sur le critère de la bonne gouvernance et la promotion de l’économie du marché. D’un autre côté, d’autres adoptent une position où la conditionnalité de leurs rapports avec les Etats africains est reléguée au second plan. Mais dans les deux cas de figure, la mainmise sur les ressources africaines demeure une finalité essentielle pour ces puissances.L’ensemble des phénomènes de politique internationale, notamment les relations entre les Etats africains et les organisations internationales, soulève des tensions nées des inégalités et menace la paix mondiale, ce qui pose la nécessité d’inventer des formes de régulation et des modes de gouvernance.
Les institutions internationales tendent à faire penser que la gouvernance et la démocratie, à…