Les célibataires de plus en plus courtisés

Les célibataires de plus en plus courtisés

Le 12 février 2004 par FANNY GUINOCHET

ENQUêTE Saint-Valentin ou pas, ils ne sont pas les parents pauvres de la consommation. Cette cible, dont le pouvoir d’achat est supérieur à la moyenne, est hautement convoitée par les marques. Dans différents secteurs, elles sont de plus en plus nombreuses à vouloir séduire ces millions de solos. Doigté exigé!

J eudi, 19 heures, au premier étage des Galeries Lafayette à Paris, une file d’attente inhabituelle se presse. Lancement d’un nouveau produit ? Premier jour des soldes ? Non, juste une pénurie de paniers mauves, sésame indispensable pour participer à la fête des célibataires des Galeries Lafayette. Depuis octobre dernier, le célèbre magasin a adopté le « market dating », dont le but est detransformer le supermarché en un lieu de rencontres. Un concept qui a fait ses preuves aux Pays-Bas, en Suisse, en Suède et même en Corée du Nord. Muni d’un Caddie identifiable, preuve irréfutable qu’il fait bien partie de la communauté des solos, le (ou la) célibataire arpente les rayons tout en espérant trouver l’âme soeur. A deux jours de la Saint-Valentin, c’est une façon pour l’enseigne demontrer qu’elle ne les néglige pas. « Il s’agit de décomplexer ce consommateur. Aujourd’hui, les marques incitent les célibataires à assumer leur situation », analyse Jean-Claude Kaufmann, sociologue et directeur de recherche au CNRS. Au lieu de stigmatiser ce public, tout est mis en place pour lui renvoyer une image positive. Et pour cause ! La connotation péjorative associée au statut decélibataire restait, jusqu’à présent, l’un des principaux freins à l’achat de produits adressés à cette cible. Mais il s’agit aussi de fidéliser la population des solos. « Tout le monde l’est plus ou moins à un moment de sa vie », précise Paul Archambault, directeur des études de Consodata, le spécialiste des bases de données marketing sur la consommation des foyers français. Le caractère transitoire dustatut de solo rend d’ailleurs la cible très hétérogène : post-adolescents, trentenaires, divorcés, seniors…

« Le célibataire représente un Français sur quatre, impossible d’ignorer cette cible », explique Jean-François Hurth, qui gère la communication des magasins d’ameublement Fly. La taille du marché a de quoi allécher les marques. Les solos étaient 13,8 millions selon les chiffres 2002 del’Insee, soit 5 millions de plus en trois ans. S’y ajoutent les familles monoparentales avec enfants de moins de 25 ans, soit 1,6 million de personnes supplémentaires. De surcroît, cette population affiche un solide pouvoir d’achat : avec un revenu annuel moyen de 18 000 euros, elle se situe au-dessus de la moyenne française. Alléchées par une telle manne, les marques encouragent les solos àrevendiquer haut et fort leurs habitudes de consommation et même leur statut. Avec la bague Nozatoo, Camille Morille et sa fille Hélène Lempereur, vont jusqu’au bout de la logique. Vendu uniquement sur internet, leur anneau d’acier inoxydable se veut un signe de reconnaissance pour faciliter l’approche et aider les timides. Audacieux !

Tous les secteurs s’y mettent… mais avec prudence

« Attentionde ne pas tomber dans la ghettoïsation ! », alerte Jean-Claude Kaufmann. Approcher cette population exige en effet du doigté. Première précaution : s’adresser au solo plutôt qu’au célibataire. Sodebo a retenu la leçon. Le roi de la pizza individuelle a choisi la voie de la prudence. « Pour nos pizzeriades – pizzas mono portions – nous préférons miser sur une circonstance de dégustation où lapersonne est seule plutôt que d’insister sur son statut de célibataire à proprement parler », explique Anne Brisacier, responsable marketing. Aujourd’hui chez Sobedo, les célibataires représentent un petit tiers des clients. Mais ce chiffre ne devrait pas tarder à s’accroître tant la marque redouble d’efforts pour les séduire. « En tant que numéro 2 sur le marché du sandwich, nous voyons dans ce…