Tous les matins du monde de Pascal Quignard, publié en 1991, est marqué du sceau de la mort, et ce depuis le décès de Mme de Sainte Colombe jusqu’à la mort de son mari. Seulement, le récit estlui-même imprégné par la musique et ne peut donc être dissocié de cette mort omniprésente. Aussi, comment le lien entre la mort et la musique se manifeste-t-il dans l’œuvre quignardienne ? La mort sembleêtre à la source de l’inspiration musicale : ainsi Le Tombeau des regrets. Par cette musique, le violiste entre en contact avec le monde des trépassés et fait revivre ces êtres d’antan de courts instants.Enfin, la musique chez Quignard est pour l’homme le souvenir d’une voix perdue, celle de l’enfance, celle de la mère aussi.
I] La musique post-mortem
La mort incite les artistes à la créationmusicale. Les décès, des femmes en particuliers, sont source d’inspiration. Ainsi Sainte Colombe, suite à la mort de sa femme, « s’exerça jusqu’à quinze heures par jour » (p. 12). Suite au suicide deMadeleine, c’est Marin Marais qui connait un déclic : alors grand courtisan du roy, il se met à craindre la perte du répertoire de M. de Sainte Colombe et s’en va rejoindre la petite cabane au bord de laBièvre, la nuit (p. 108). Ce déclic tend à être une renaissance : il délaisse dès lors la musique de cour pour la musique véritable. Ainsi voit-on l’effet de la mort sur la musique, son influence.Mieux, la mort semble être une nécessité pour l’éclosion de l’artiste. Elle le transcende. D’ailleurs, les morceaux composés suite à ces décès sont en quelque sorte un hommage post-mortem : Les Pleurs,Les Enfers, L’Ombre d’Enée, La Barque de Charon.
II] La rencontre post-mortem
La mort n’engendre pas qu’une inspiration. La création musicale en découlant, telle une symétrie, permet la rencontreavec le monde des morts. C’est par la musique que M. de Sainte Colombe retrouve sa femme. Il composa en hommage à sa mort Le Tombeau des regrets. Et alors qu’un jour il le jouait, elle lui…