Le haïku
Entre tradition et modernité
I/ Un poème spécifique avec des exigences précises
1)Sous quelle forme se présente le haïku?
Le haïku est un poème d’une extrême concision. En Occident et dans sa forme japonaise la plus classique, il s’écrit principalement sur trois lignes selon le rythme court/long/court : 5/7/5 syllabes. Les poètes contemporains peuvent écrire des haïku sous desformes beaucoup plus brèves encore et même bousculer le rythme. Il ne contient pas de rime. Il ne s’agit pas d’un tercet, mais d’un monostique de 3 mètres syllabiques, c’est-à-dire un poème d’un seul vers. Le vocabulaire utilisé est en général assez simple pour être compris par la majorité des lecteurs, et même si possible par les enfants. Le poème ne doit réclamer aucune explication en dehors delui-même. Exception : dans le cas d’une série de poèmes liés entre eux d’une façon ou d’une autre ou faisant partie d’un recueil ou devant faire partie d’un recueil à venir, on admet que l’ensemble de la série, le thème, le contexte de la série ou l’éventuel titre de celle-ci, puissent compléter ou éclaircir ce que l’un ou certains poèmes de cette série laissent dans l’ombre.
2) Des règlesspécifiques au haïku.
Le haïku doit respecter plusieurs règles :
-il lui faut contenir un kigo (mot de saison), c’est-à-dire une référence à la nature ou un mot clé concernant l’une des quatre saisons. Notons au-delà des quatre saisons traditionnelles, le jour de l’an est très important et peut être considérée en haïku comme une saison à part entière. Si la saison peut être nommée, le cadre poétiqueimpose le plus souvent de l’évoquer. Cerisier en fleurs pour le printemps, vol de hannetons pour l’été, etc. Mais « pleine lune », qui ne peut être rattachée à une saison en particulier, constitue également un excellent kigo. Au Japon, des livres spécialisés recensent les expressions les plus courantes pouvant être utilisées comme kigo. Ces expressions sont généralement placées dans le premiervers. Quand le haïku ne contient pas d’élément indiquant la saison, on l’appellera un muki-haïku (littéralement « haïku-sans-mot-de-saison »).
-Le haïku ne se contente pas de décrire les choses, il nécessite le détachement de l’auteur. Il est comme une sorte d’instantané. Il n’exclut cependant pas l’humour les figures de style, mais tout cela doit être utilisé avec parcimonie. Il doit pouvoir selire en une seule respiration et de préférence à voix haute. Il incite à la réflexion. Il est préférable de le lire deux fois afin d’en saisir complètement le sens et la subtilité. C’est au lecteur qu’il revient de se créer sa propre image. Ainsi, le haïku ne doit pas décrire mais évoquer. Plutôt qu’une phrase répartie sur trois lignes, le haïku procède par une notion de césure, le kireji.
3) Lapossibilités de certaines libertés.
Il n’est pas rare de trouver, même chez les classiques, des haïkus qui transgressent les règles. Mais de l’ensemble doit se dégager ce que certains appellent un « esprit haïku » – indéfinissable en tant que tel. Il procède du vécu, du ressenti, de choses impalpables. Généralement, la structure court-long-court est conservée. Cela dit, la structure 5-7-5 estencore la plus courante.
Les haïkus avec quelques mores de plus ou de moins sont parfois tolérés, sous la forme hach? (rythme brisé), et des termes techniques les désignent : un haïku de plus de 17 mores est dit ji-amari (« lettres en trop »), et un de moins de 17 mores est dit ji-tarazu (« lettres en moins ») ; cependant, ils ne sont considérés comme de bons haïkus que si la brisure sembleinévitable pour obtenir l’effet produit. Les haïkus de type 5-5-7 ou 7-5-5 (voire 5-12 ou 12-5 quand un mot enjambe une division) sont plus fréquents. (L’œuvre du troisième maître classique, Issa, présente de nombreux exemples de chacune de ces transgressions.)
Il existe de multiples écoles de haïku, de multiples tendances. Le haïku zen, le haïku urbain, le haïku engagé… Chacune pouvant ou non…