On admet sans difficulté que l’homme utilise l’art comme moyen d’évasion. Nous voyons dans l’art une sorte de moyen de nous procurer des illusions colorées, musicales dont la seule fonction serait defaire oublier cette réalité terne, brutale dans laquelle nous vivons. Ainsi, la question du sujet semble déroutante dans la mesure où elle interroge une évidence invisible. Or le sujet posé nousconduit à quelques difficultés. L’art est le produit de l’imagination. Or, par définition, l’imaginaire s’oppose au réel : quelle est la différence entre une expérience lue et une expérience vécue ? Elless’opposent dans la mesure où l’une à concrètement eu lieu, l’autre n’est que fiction. Donc l’art nous détourne du réel, il nous en éloigne : ne dit-on pas qu’il peut servir de refuge, peut nouspermettre de fuir le réel. Mais, l’art, s’il est imaginaire, il n’est pas pour autant moins réel : il appartient au monde des choses qui sont, qui produisent des effets – mon rêve, même si son contenu estimaginaire, est lui bien réel puisqu’il produit des effets sur moi. Il en va de même pour une oeuvre d’art – elle existe, je peux la toucher, la voir, l’entendre ou la lire. Ainsi l’oppositionimaginaire/réel n’est pas définitive. L’art appartient donc au réel et en est le produit : peut-il alors le refléter, nous en parler, voire nous plonger dedans ? En tant que discours, nous éloigne-t-il duréel ou au contraire nous renseigne-t-il sur lui ? En effet, l’art est un discours, mais est-ce alors un discours vrai ? Une première question apparaît, le discours qu’il porte ne nous permet-il pasd’accéder au réel ? Une deuxième question peut être posée, si l’art nous éloigne du réel, donc ce qui est, ce qui existe effectivement, par opposition, est ce que l’art nous rapproche de l’idéal, c ‘est àdire, ce qui devrait être, ce qu’on souhaite voir exister. La présupposer du sujet consiste à savoir quel rapport l’art entretient avec la réalité, s’il est dans son essence de la délaisser, s’il…