Comment procède les historiens

L’histoire ! Comment procèdent les historiens ? Comment font-ils pour raconter des faits dont eux-mêmes n’ont probablement pas été témoins ? Trois d’entre eux nous livrent leurs impressions sur les faits et les écrits.
«Le Petit Larousse défi nit l’histoire comme la relation entre des faits et des événements passés», lance d’emblée Guy Rouillard, docteur ès lettres et auteur de plusieursouvrages historiques. Il poursuit en décrivant la discipline de l’historien comme étant l’étude des sciences du passé, de l’évolution de la vie et des sociétés humaines décrite par des faits écrits. «L’histoire consiste à retracer les faits d’une période donnée en cherchant des documents fiables», dit-il. Jocelyn Chan Low, chargé de cours à l’université de Maurice et historien, cite, quant à lui,l’historien français Michel de Certeau. Ce dernier décrivait le discours historique comme un «texte feuilleté», soit le récit de l’historien agrémenté de références en bas de page.
«Maintenant, il faut savoir quels sont les documents fi ables. Il est primordial de savoir choisir et, surtout, de citer ses sources», estime Guy Rouillard. Pour lui, tous les documents relatant des faits historiques ne sontpas fi ables. Il incombe alors à l’historien, de par son expérience, de faire le tri. De contrôler et de contre-vérifier les faits surtout. Satteeanund Peerthum, docteur en histoire, explique, pour sa part, que chaque historien a sa propre méthodologie par rapport à ses recherches. Il développe celle-ci selon l’approche à partir de laquelle il a été formé. «J’ai été formé à Moscou. L’approche quel’on m’a enseignée est, dans une large mesure, marxiste. Cela fait que j’utilise le concept de classes dans mes analyses», partage-t-il.
Nous apprenons ici que l’historien ne se contente pas d’écrire des faits. Il les analyse, les décortique et les présente selon une rigueur qui lui est propre. Guy Rouillard est, lui, d’avis que l’historien doit se contenter de citer des faits, et non pas de selancer dans l’interprétation de ceux-ci. «L’interprétation doit être laissée au lecteur, c’est à lui de se faire une opinion. L’historien, lui, analyse les faits et en tire quelques déductions en fonction de ses sources. Pour cela, il est important que ce dernier sache ce qu’il veut chercher», conçoit-il. Satteeanund Peerthum fait cependant ressortir que l’analyse historique comporte une parthistorique certes, mais aussi sociologique. «De retour à Maurice, j’ai dû adapter ma méthodologie en fonction des spécificités de la société mauricienne», relate l’historien.
«L’histoire devrait être vérité si elle est bien écrite», estime Guy Rouillard. Selon lui, les bons historiens savent se montrer honnêtes dans leur démarche. Ces derniers ne peuvent passer à côté de la vérité. C’est sur quoi l’avisde Jocelyn Chan Low diverge : «Le récit historique contient des failles. L’historien utilise des documents qui ne contiennent pas tous les éléments. Le récit est alors basé sur ce que croit percevoir son auteur.» Pour lui, toujours, l’écrit historique est un recueil de silences sur certains faits. L’historien est celui qui choisit et remplit ces silences, ces actes et faits manquants dans lesdocuments. Cependant, Jocelyn Chan Low explique que le devoir de ce dernier est de rester très honnête dans sa démarche. Fait qu’il accomplit en justifiant ses références, garantes de son objectivité.
Citant l’historien français Marc Bloch, Jocelyn Chan Low explique que «l’ennemi de l’historien, c’est le jugement». L’universitaire qu’il est fait ressortir le point fondamental de la difficulté pourcelui qui se lance dans l’historiographie – soit l’écriture d’oeuvres d’histoire – de rester objectif. Cela pour une raison essentielle, à savoir que la vérité est multiple. L’historien ne peut se montrer honnête que s’il accepte cet état de choses. «L’histoire aide à comprendre une vérité qui, elle-même, est dure à comprendre parce qu’elle est multiple», ajoute-t- il. Il prend pour exemple…