Article extrait du dossier « Vieillesse, dépendance et lieux de vie » de l’Observatoire n°44/2006 ©
La dépendance des personnes âgées. Définition, causes et conséquences
Le terme dépendance est utilisé depuis longtemps dans différents contextes ce qui prête à confusion et ne garantit pas que la réalité désignée soit univoque (Leroy, 1997). Il peut avoir un sens positif d’échange (la vie estfaite d’interdépendance) ou un sens plus péjoratif traduisant la subordination, la soumission, l’asservissement. En psychologie, le terme décrit la situation de l’enfant qui dépend de l’assistance parentale aux plans matériel, psychologique et social (Jalley, 1991). En médecine, il s’agit d’un état pathologique révélé par l’arrêt de la prise d’une substance toxique produisant des symptômesd’abstinence (Le Moal, 1991). Les économistes qualifient parfois de dépendantes, les populations non-actives (adultes ou âgées) bénéficiant d’un revenu de substitution.
Dépendance de la personne âgée
En gérontologie, le concept de dépendance serait apparu pour la première fois en 1973 dans un article d’Hugonot «Prévenir la dépendance» publié dans le journal Le Monde. Il est habituellementcompris comme l’état de la personne âgée qui ne peut accomplir seule les activités de la vie courante. Concrètement, il évoque un état de besoin et signifie le transfert vers un tiers d’actes nécessaires pour assurer les tâches de la vie courantes. Le sens de la dépendance va toujours de la personne âgée vers l’autre, celui qui fournit de l’aide. Ce concept est surtout utilisé dans les paysfrancophones et s’applique exclusivement aux personnes âgées. Pour les mêmes incapacités et les mêmes besoins d’aide, les adultes sont qualifiés d’handicapés. Cette qualification a une connotation beaucoup moins négative que celle de dépendant. Les pays anglo-saxons et nordiques préfèrent le terme de disability (infirmité, incapacité) et qualifient de frail (fragile, vulnérable) les personnes âgéesprésentant des difficultés fonctionnelles.
Les lectures de la dépendance
Les travaux sur la dépendance mettent l’accent sur ses causes, sur ses conséquences dans les actes «ordinaires» ou «essentiels» de la vie ainsi que sur la nécessite de l’aide d’une tierce personne. Schématiquement, on distingue deux lectures de la dépendance, l’une restreinte (ou biomédicale) et l’autre globale (oumultidimensionnelle).
A l’origine, la dépendance était uniquement qualifiée de physique et/ou instrumentale. On considérait qu’elle résultait essentiellement de déficiences physiques ou sensorielles entraînant des incapacités fonctionnelles dans les activités de la vie courante. Ensuite, on a distingué la dépendance psychique qui traduit la prise en compte des perturbations mentales (en particuliercognitives) comme facteur déterminant la dépendance. Cette lecture biomédicale se retrouve dans la définition du rapport Arreckx (1979): «on entend par personne âgée dépendante tout vieillard qui, victime d’atteintes à l’intégralité de ses données physiques et psychiques, se trouve dans l’impossibilité de s’assumer pleinement, et, par là-même, doit avoir recours à une tierce personne, pouraccomplir les actes ordinaires de la vie».
Parallèlement, une lecture plus globale de la dépendance s’est développée. Pour van Den Heuvel (1976), la dépendance peut relever:
• d’une incapacité pratique, presque physique qui nécessite l’aide ou des soins d’autrui;
• d’une incapacité ou d’une impuissance éprouvée dans la relation personnelle et/ou sociale;
• d’un besoin psychologique (physique)d’être pris en charge, contrôlé ou nourri.
L’auteur souligne que la dépendance peut être identifiée soit par la personne elle-même soit par l’entourage (familial, professionnel). De plus, l’aide d’une tierce personne peut se manifester selon trois gradients: surveillance (ou supervision), assistance (aider à faire) et suppléance (faire à la place de). Wilkin et Tompson (1987) ont établi une…