Activities parentales

Partage des activités parentales : les inégalités perdurent
Carole Brugeilles Pascal Sebille
Université Paris Ouest Nanterre. Centre de recherche Populations et Sociétés.

Mots-clés : Parentalité – Rapports sociaux de sexe – Partage des tâches.

Le partage des activités parentales de soins et d’éducation des enfants est au cœur des problématiques sur l’égalité entre les hommes et les femmeset sur la transmission intergénérationnelle des comportements sexués. La participation des mères et des pères selon la nature des tâches réalisées (habillage, aide aux devoirs, accompagnement, coucher, loisirs), ainsi que son évolution en quelques années, sont analysées grâce à deux vagues de l’enquête Étude des relations familiales et intergénérationnelles réalisées en 2005 et 2008 parl’Institut national d’études démographiques. Dans un premier temps, l’analyse comparée entre les deux dates permet de dresser un panorama de l’évolution des implications paternelles et maternelles, notamment grâce à un « suivi » des couples parentaux au cours de la période. Dans un second temps, les raisons des changements sont étudiées. L’activité professionnelle des femmes et ses transformations au fil desannées apparaissent primordiales pour la redéfinition du partage des activités, mais elle résulte aussi d’autres caractéristiques sociodémographiques de la famille et du couple.

M

algré de nombreux discours sur l’évolution de la participation des pères et des mères aux tâches parentales en France, le maintien des inégalités persiste. Qu’elles s’intéressent au partage des activitésdomestiques ou parentales, ou à l’attention et aux soins qui sont portés par chaque parent aux enfants, les recherches sont nombreuses et unanimes : les mères assument toujours une large part de ces activités (Brousse, 1999 ; Barrère-Maurisson, 2001 ; Barrère-Maurisson et Rivier, 2002 ; Méda et al., 2004 ; Puech, 2005 ; Bauer, 2007 ; Bustreel, 2007 ; Coulon et Cresson, 2007). Ce partage renvoie à deuxprincipaux enjeux : le premier relève de la place des hommes et des femmes, de leurs possibilités d’investissement et de réalisation dans les sphères publiques et privées ; le second de la socialisation et de la transmission aux enfants de schémas de comportements et de modèles sexués (Rouyer et Zaouche-Gaudron, 2006 ; Dafflon Novelle, 2006).

L’enquête Étude des relations familiales etintergénérationnelles 2005 (ERFI) (encadré p. 18) a contribué à cette connaissance en s’intéressant aux relations de genre observées entre les conjoints (Cosio-Zavala et Sebille, 2009), à l’organisation des tâches domestiques et parentales au sein des couples, notamment au travers d’une spécialisation entre les conjoints (Bauer, 2007 ; Solaz, 2009), et aux discours qui sont attachés à ces pratiques(Régnier-Loilier et Guisse, 2009). L’analyse de la répartition des activités parentales a confirmé la part prépondérante de la participation maternelle et a montré les facteurs explicatifs de l’implication des pères (Brugeilles et Sebille, 2009 a et b). Alors que la nature des tâches est apparue très discriminante, les pères s’investissant davantage dans les tâches moins contraintes et renvoyant à desactivités moins tournées vers la gestion domestique (loisirs, coucher, accompagnement lors des trajets), la composition de la fratrie, selon le nombre d’enfants, leur sexe et leur âge s’est imposée comme un déterminant majeur de la participation paternelle, notamment pour certaines activités répondant à des modèles de transmission (loisirs) et/ou à des soins (l’habillage). Ainsi, les pères se mobilisentplus lorsqu’ils ont un enfant unique, modulent leur participation selon le sexe de l’enfant et se désengagent volontiers lorsque les enfants sont plus âgés et autonomes. Enfin, la répartition des tâches entre les conjoints apparaît fortement dépendante de différents rapports sociaux entre les parents : dotation scolaire, âge, participation aux revenus du ménage, caractéristiques de l’emploi….