Synthèse de la lecture analytique de l’extrait de La Princesse de Clèves de Mme de Lafayette. La scène de l’aveu au prince de Clèves.
Eléments d’introduction :
– Rappeler qui est Mme de Lafayette (femme noble du XVIIème ayant reçu une éducation littéraire soignée, c’est une mondaine raffinée. Elle appartient au courant précieux, sans être hautaine ni pédante (comme les précieuses queMolière critique dans Les précieuses ridicules). [Revoyez les éléments de cours sur la préciosité : ils vous seront peut-être utiles pour l’entretien].
– Situez l’extrait dans l’œuvre (cf. notes de cours).
– Problématique envisagée en classe: il s’agit de montrer que ce passage se nourrit de la tradition classique (influence de la tragédie sur l’écriture du passage) et de la pensée précieusetout en s’inscrivant dans une forme de modernité : les personnages sont ici abordés selon leur caractère, et non selon les actions qu’ils accomplissent dans le but de nourrir une réflexion sur la vertu et la « fides ».
– Plan proposé : I- une scène inspirée de la scène d’aveu dans la tragédie ;
II- un miroir nuancé des valeurs précieuses de la fin du XVIIème siècle.I- a) Un aveu pathétique.
Les deux personnages sont touchants, et leur détresse émouvante tant leur désespoir semble insurmontable. Les paroles, mais aussi les attitudes des deux protagonistes (= personnages principaux) suggèrent une intense émotion qui gagne le lecteur.
• Les attitudes :
La princesse prononce son aveu en « se jetant à ses genoux »ligne 10 : attitudetraditionnelle/ lieu commun (= topos) de la suppliante [on peut alors faire référence à l’histoire de Sophonisbe, reine punique ayant vécu à la fin du IIIème siècle av. JC, dont la supplique au roi Masinissa est restée célèbre et fait l’objet d’une réécriture par Melle de Scudéry, précieuse raffinée de l’époque ; mais aussi à la supplique de la pénitente chrétienne, puisque tout dans l’organisation de sondiscours y renvoie : aveu (lignes 12 « il est vrai que… » à 19 ; demande le pardon « je vous demande mille pardons »ligne 19 ; demande de l’aide « conduisez-moi »ligne 23, montre qu’il lui a été pénible d’avouer « une chose que je n’ai pas la force de vous avouer »lignes 1-2/ le silence : « Mme de Clèves ne répondit point »l. 7 et « son silence » ligne 7/ « quelque dangereux que soit le parti que jeprends »l. 17 ; Mme de Clèves est convaincue de la vertu de cette confession, car celle-ci demande du courage : « l’aveu que je vous ai fait n’a pas été par faiblesse »l. 62, et qu’elle montre tout le respect qu’elle a pour son époux : « il faut avoir plus d’amitié et plus d’estime pour un mari que l’on n’en a jamais eu »l. 21-22 –noter ici l’hyperbole utilisée par la princesse afin de soulignerson honnêteté et sa fidélité envers son mari. Enfin, elle réclame l’assurance qu’elle sera toujours protégée, à défaut d’être aimée « aimez-moi encore, si vous pouvez »l. 24]
Le prince quant à lui est « hors de lui-même », l. 26, est demeuré « la tête appuyée sur ses mains » l. 25-26. il « pensa mourir de douleur » ligne 29. Cette posture est celle du désespoir. Le détail qui est ajouté en finde phrase : « il n’avait pas songé à faire relever sa femme »lignes 26-27 montre que sa détresse est infinie : la souffrance que lui inflige le discours de sa femme lui fait oublier sa dignité et son rang : jamais un homme de sa qualité n’aurait laissé transparaître un tel trouble –même à son épouse, cela était presque indécent pour l’époque puisqu’il trahit sa passion amoureuse pour elle (cequ’il lui avoue d’ailleurs lignes 35-36)-, et ensuite jamais il n’aurait toléré que sa femme demeure agenouillée : le prince est galant homme, il ne peut accepter une attitude aussi humiliante, pour ne pas dire obscène. Il y a donc là une description euphémisante qui traduit le trouble/ le désordre amoureux dans lequel se trouve plongé le prince et contre lequel il va devoir lutter. Le pathétique…