Manuscrit auteur, publié dans « Culture des organisations et DISTIC, Nice : France (2005) »
L’opérationnalité de la culture organisationnelle au sein d’une association multiculturelle européenne L’approche sémiopragmatique de la communication (Boutaud, 1998) met en avant la coconstruction du sens par les acteurs dans une interaction interpersonnelle. D’un point de vue sémiopragmatique, laculture d’une organisation représente un ensemble de codes, de rôles, de rites, de valeurs et de symboles plus ou moins bien définis, dont les acteurs peuvent se servir pour structurer leurs interactions et produire du sens1. Pour comparer une culture organisationnelle à un DISTIC, nous nous intéresserons au critère de son opérationnalité dans les interactions interpersonnelles. L’opérationnalité d’uneculture organisationnelle, dans le sens que nous réservons à ce terme, se réfère au degré auquel les acteurs ont recours à des éléments propres à cette culture pour structurer leurs interactions. Une culture qui fonctionne comme un DISTIC déterminera la nature spécifique des relations entre les membres de l’organisation. L’étude s’appuiera sur le cas d’une ONG étudiante, AEGEE (l’Association desEtats Généraux des Etudiants de l’Europe), association multiculturelle active dans quarante-deux pays parmi les pays européens et leurs voisins proches. Une analyse sémiotique du principal dispositif technique de communication de l’association, son portail Internet, aura pour objectif de déceler les traits culturels implicites à l’utilisation de cette interface. La prise en compte de la structurede l’organisation et des tensions observées entre les niveaux permettra de resituer la vision culturelle incarnée par l’interface technique par rapport à l’ensemble des acteurs qui composent l’organigramme de l’association. Enfin, des observations résultant de l’investigation ethnographique permettront d’éclairer le rôle de la culture dans les pratiques des acteurs en situation d’interaction. Cesréflexions aboutiront à une description de l’opérationnalité de la culture d’AEGEE. Le portail Internet : dispositif clé de la communication interne de l’association L’association AEGEE existe depuis vingt ans et comprend désormais environ 17 000 membres dans 260 villes universitaires. Sa mission, définie dans les statuts de l’association2, est de promouvoir l’intégration européenne et une vision del’Europe garante des valeurs de liberté, de démocratie et des droits de l’homme, dans les pays européens (au sens large). Concrètement, elle intervient dans quatre domaines : l’enseignement supérieur, la promotion de la paix et de la stabilité en Europe, la citoyenneté active et l’échange culturel. Les actions entreprises sont relayées par onze groupes de travail permanents, et se traduisent parenviron 250 conférences, débats ou autres manifestations par an au niveau européen, ainsi que de nombreux événements locaux. Pour réduire le risque de différends d’ordre national, l’association n’intègre volontairement pas ce niveau dans sa structure. Les deux niveaux reconnus sont local (les antennes dans les villes universitaires) et européen (neuf membres élus au « comité directeur » quisiègent à Bruxelles, et les différents groupes de travail et commissions composés d’individus à travers l’Europe). Depuis le début des années 1990, l’association s’appuie de plus en plus sur les NTIC pour la communication interne. Outre la taille de l’association et sa structure relativement peu
1
hal-00462570, version 1 – 10 Mar 2010
Cette définition de la culture de l’organisation correspond àl’intériorisation de ce que Mucchielli (2004) appelle le « contexte organisationnel ». Du point de vue interactionniste, les individus mobilisent leurs connaissances de la culture organisationnelle lorsqu’ils appliquent le contexte organisationnel à leurs interactions. 2 « Corpus Ivridicvm Aegeense » version 15.0 décembre 2004, disponible sur www.aegee.org.
1
hiérarchisée, plusieurs…