Économiepublique

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Revue de l’Institut d’Économie Publique
Deux numéros par an

public economics

no 15 – 2004/2

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overviewEurope, langue et démocratie Europe, language and democracy

L’anglais comme lingua franca : questions de coût et d’équité. Commentaire sur l’article de Philippe Van Parijs
François Grin ?

Introduction
C’est pour moi un privilège d’être invité à commenter un texte de Philippe Van Parijs. Du point de vue de mon modeste champ de spécialisation – l’évaluation, dans une perspective économique, despolitiques linguistiques et éducatives – il ne fait aucun doute que Philippe Van Parijs est parmi les auteurs à la pensée la plus riche de notre époque. Loin des banalités molles que l’on rencontre si souvent dans le discours académique ou politique sur la diversité des langues, Philippe Van Parijs a déjà, dans divers écrits, formulé nombre de propositions stimulantes, souvent provocantes, maistoujours de la plus haute tenue analytique. L’immense admiration que j’ai pour le travail de Philippe Van Parijs, ainsi que le très vif plaisir que me procure chaque occasion de collaboration, n’interdit pas les désaccords, et certains se font jour à la lecture de son texte. Et si le présent commentaire peut présenter quelque utilité pour les lecteurs d’Économie publique, c’est sans doute,justement, en soulevant des questions à l’égard desquelles nos opinions divergent, même si nos analyses se rejoignent sur bien d’autres points. Il n’y a pas lieu de s’attarder sur les deux premières sections du texte, qui ne me posent aucun problème : l’analyse de la redistribution en Europe et des conditions de sa poursuite à moyen terme me paraît pleinement convaincante, encore que l’on puisse s’étonner(j’y reviendrai plus loin) de l’apparente non prise en compte des possibilités qu’ouvrirait une coordination plus étroite entre États

?. Professeur d’économie à l’École de traduction et d’interprétation (ETI), Université de Genève.

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no 15 (2004 / 2), 3-11

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membres, notamment en vue de battre en brèche les effets pervers de la sousenchère ?scale,effets sur lesquels Philippe Van Parijs attire à juste titre notre attention. Passons maintenant à ce qui constitue, à mon sens, le cœur de l’article, et où l’on aborde les thèmes les plus ardus, à savoir les sections 3 et suivantes. Relevons d’emblée qu’il est dif?cile de commenter ce texte pour lui-même, car il en reprend largement quelques autres, dans lesquels l’argumentation est développée defaçon plus approfondie ; mon commentaire ne pourra donc guère éviter, pour faire justice à la pensée de Philippe Van Parijs, de faire parfois allusion à un autre article (Van Parijs, 2004, que je désignerai ci-après par « ELC », l’abréviation de son titre).

1. Sur la dynamique des langues
D’entrée de jeu, l’auteur pose quelques hypothèses comme des quasi-certitudes ; la première d’entreelles, c’est que l’intercompréhension n’est véritablement possible qu’au moyen d’une – et une seule – lingua franca. C’est là une opinion défendable, mais ce n’est pas une évidence ; rappelons que la Suisse fonctionne raisonnablement bien comme État moderne, depuis deux siècles, avec trois, puis quatre langues of?cielles. Quant à l’échec de la Belgique à asseoir le bilinguisme français-néerlandais…