Emille zola

Quand la diva divague…
INTERVIEW DE NATALIE DESSAY
A l’occasion de la sortie de son dernier disque accompagné d’un DVD, retraçant son fulgurant parcours de soprano colorature, la célèbre cantatrice française se confie à nous à un tournant de sa carrière. Elle s’apprête désormais à aborder le registre de soprano lyrique avec une conviction et une foi inébranlables en son travail de comédiennelyrique.

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Vous avez une voix qui vous a naturellement portée à exécuter, à vos débuts, des airs vertigineux, êtes-vous en accord avec le tempérament des rôles traditionnellement dédiés à cette voix ?

Eh bien non, justement. Je l’ai fait pendant quinze ans parce que c’était ma voix, j’y ai pris du plaisir par ailleurs, mais la voixayant changé… c’est tant mieux ! Les choses ont évolué et je peux désormais me tourner vers un répertoire qui me correspond davantage. C’est pour cela que je souhaitais faire un DVD, reflétant tout ce que j’ai fait pendant quinze ans, afin de tourner une page. Sur les treize extraits qui composent le DVD, je ne vais conserver qu’un seul des rôles à mon répertoire, celui d’Ophélie (‘Hamlet’,d’Ambroise Thomas).

Ce DVD fait donc office de “testament” en quelque sorte dans votre carrière. Il marque un tournant.

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J’appellerais plutôt cela un “album photo” ! (rires)

En regardant le DVD justement, on remarque une évidente agilité et un réel plaisir à évoluer dans les aigus, est-ce toujours le cas ? Comment conciliez-vous ce trait naturel de votrevoix avec la maturité de celle-ci ? Comment allez-vous gérer le changement de registre ?

La voix a évolué dans le sens où elle est devenue plus grande et plus ronde. Rassurez-vous, jusqu’au contre-mi tout va bien ! Je peux donc me servir des suraigus comme avant. C’est seulement la couleur qui a changé. Elle est désormais plus ronde et me permet d’aborder un autre répertoire. Mais je n’abandonnepas les aigus pour autant !!! Je vais dans un répertoire qui nécessite de la virtuosité et de l’aigu à la fois, c’est juste plus beau maintenant (rires).

On n’a jamais la voix que l’on aurait aimé avoir. Quelle voix auriez-vous rêvé d’avoir ?

Si j’avais eu le choix, j’aurais aimé être un grand soprano dramatique, pour pouvoir chanter Tosca, Salomé, Brunehilde… J’aurais adoré chanter Puccini: ‘Manon Lescaut’, ‘Mme Butterfly’… Oui, j’ai un petit regret quand même. J’espère bien, toutefois, pouvoir un jour chanter Mimi (‘La Bohème’ de Puccini). Leontina Vadova et Ileana Cotrubas l’ont bien fait, magnifiquement d’ailleurs. Ce sont deux sopranos roumaines que j’admire énormément, comme Angela Gheorghiu, j’aime leur tempérament de feu et leur côté latin à la fois.

Qu’attendez-vous d’unrôle à l’opéra ? Qu’il vous révèle ? Qu’il vous fasse travailler dans une direction inattendue ?

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Qu’il soit nouveau ! J’attends de ne pas pouvoir faire ce que je sais déjà faire. Donc, effectivement, j’attends qu’il me révèle quelque chose de moi que je ne connaissais pas.

Y a-t-il un domaine artistique ou un univers culturel auquelvous vous intéressez en dehors du chant ?

Le théâtre.

Ce sont en effet vos premières amours. Vous aimeriez y revenir un jour ?

J’ai un rêve dans ma vie. Ce serait de monter ‘L’Ignorant et le fou’ de Thomas Bernhard. Car dans cette pièce, il y a un rôle qui parle de moi : il s’agit d’une fille qui chante ‘La Reine de la nuit’ pour la 527e fois et qui en a ras-le-bol. Je pense sincèrementque ce rôle a été écrit pour moi, qu’il y a là un véritable appel ! (rires)
Cependant, faire du théâtre pour faire du théâtre ne m’intéresse pas. Je considère le métier d’acteur comme un véritable travail, et ce n’est pas parce que l’on chante que l’on sait jouer pour autant. Cela n’a rien à voir. Jouer à l’opéra est plus facile que jouer au théâtre, car la musique est déjà écrite, alors…