Et si c’était la dernière fois que tu voyais,
tu regarderais avec une telle attention
que ton regard d’un seul coup d’oeil embrasserait tout l’horizon.
Et si c’était la dernière fois que tumarchais,
tu poserais tes pieds avec tant de douceur et de légèreté
qu’ils deviendraient des ailes et tu pourrais voler.
Et si c’était la dernière fois que tu respirais,
tu humerais l’air avec untel allant
que tu te trouverais vivant jusqu’à la fin des temps.
Et si c’était la dernière fois que tu t’éveillais,
ce moment d’ultime conscience aurait tellement de force et de clarté
qu’iléclairerait tes nuits jusqu’à l’éternité.
Et si c’était la dernière fois que tu pensais,
la plus vulgaire de tes pensées s’auréolerait de tant d’innocence
qu’elle te conduirait jusqu’à la source : aupays du silence.
Et si c’était la dernière fois que de la solitude tu souffrais,
tu serais si reconnaissant de connaître l’absence
que tu percevrais le parfum de l’éternelle présence.
Et sic’était la dernière fois que tu jugeais,
tu serais si confus de ce penchant coupable
que tu verrais le beau au sein du condamnable.
Et si c’était la dernière fois que tu te remémorais les bonsmoments et les mauvais,
tu remercierais si fort de les avoir connus
que tu verrais les fils entre les deux tendus.
Et si c’était la dernière fois que tu créais,
ton inspiration serait si féconde
quetu pourrais comprendre l’origine du monde.
Et si c’était la dernière fois que tu aimais,
tu glorifierais l’instant avec un tel zèle
qu’il emplirait ton coeur à jamais d’amour universel.
Et sic’était la dernière fois que tu riais,
ton esprit tant se dilaterait
qu’au mirage du petit « je » jamais plus ne se prendrait.
Et si c’était la dernière fois que face à toi-même tu te trouvais,
turentrerais tant dans ce jeu de miroir
que tu pourrais percer le secret de ton histoire.
Et si c’était la dernière fois que tu lisais
les mots au fond de toi prendraient âme et corps
et…