Gorgias dialogue sur le bonheur entre socrate et calliclès

Gorgias de Platon
Commentaire d’un dialogue entre Socrate et Calliclès (492a – 493c)

Comment se comporter face à ses passions pour trouver le bonheur? Telle est la question qu’une partie du dialogue entre Socrate et Calliclès dans le Gorgias de Platon cherche à résoudre après que Calliclès ait fait l’éloge de l’homme fort et l’ait présenté comme celui capable, à l’aide de son intelligence etde son courage, d’assouvir ses passions. Au cours de l’échange, la thèse qu’expose Calliclès est réfutée par Socrate qui considère que l’homme ne pourra trouver la satisfaction qu’en apprenant la mesure et la tempérance.
Cette état d’esprit n’est pourtant pas inné à l’homme, être de passion, qui, sans cesse traversé par de nouveaux désirs, serait plus enclin à tendrevers ce qui l’habite plutôt que de devoir y renoncer. Aussi pour que la raison prenne le pas sur les passions il faut que l’homme prenne conscience de leur vanité.
Après que Calliclès ait expliqué que les passions étaient, selon lui, nécessaires puisqu’elles permettaient à l’homme qui parvenait à les assouvir d’être heureux, Socrate cherche alors à le convaincre de leur impasse et lui montre qu’unevie de contentement ne peut se trouver que dans une vie raisonnée.

Le texte débute par une réponse : celle de Socrate, qui, après avoir écouté l’avis de Calliclès, le gratifie de sa sincérité. Calliclès vient en effet d’exprimer clairement sa pensée sur le rapport qu’un homme fort doit entretenir avec ses passions. Bien que son avis puisse être moralement contestable il ose exprimer sansgêne sa conception. Aussi peut-on juger sa démarche estimable et honnête puisqu’en ne trahissant pas, lors de son discours, sa pensée profonde, ce qu’il expose prend valeur de véritable conseil. C’est d’ailleurs ce que remarquait aussi Socrate antérieurement en parlant de sa démarche comme preuve de « bienveillance en son égard ». Cette concordance entre pensée et parole fait de l’avis de Calliclès unréel « point de vue ».
Toutefois, si l’homme peut avoir un avis clair sur bon nombre de choses, tant que sa pensée est jugée contraire à la morale, il restera bien généralement dans le silence, préférant filtrer celle-ci plutôt que de l’exposer à autrui et d’être jugé. Un homme favorable à l’esclavage aura, par exemple, rarement le courage de soutenir haut et fort son opinion dans un paysl’interdisant. Cela insiste bien sur le fait que dans une société, si l’homme peut tout penser il ne peut tout dire ce qui rend dès le départ la parole et l’action ambiguë. Sa façon d’agir n’est donc pas toujours explicitement ce qu’il « dit faire ». Ainsi si de nombreuses personnes peuvent partager l’avis de Calliclès, bon nombre agiront comme lui sans le reconnaitre : le pacte du langage et par làmême celui de l’action devient ainsi faussé.
Il semble donc nécessaire de prendre en considération les différentes opinions quand ces dernières sont le résultat d’une pensée propre. Socrate prie alors Calliclès de ne pas renier ses principes et de les soutenir « coute que coute ». Dans cette opposition de point de vue c’est donc à celui qui sera capable de réfuter la pensée de l’autre sans que cedernier n’ait le moyen de le contester.
Aussi, si Socrate demande à Calliclès de poursuivre on sait dès le départ qu’il ne partage pas sa position. Calliclès impose en effet un point de vue qu’il considère comme le seul valable pour vivre tel que la Nature nous veut. Tout comme Socrate, il offre sa vision sur le «genre de vie qu’on doit avoir». Le simple emploi du verbe « devoir », que Socrateprononce presque ironiquement, ne semble pourtant pas approprié à la pensée de Calliclès. Un devoir ne laisse en effet pas la possibilité de choix, c’est une obligation que chacun doit s’imposer. Or peut-on réellement parler de devoir quand la nature de cette obligation n’est pas morale et est dangereuse aussi bien pour soi que pour autrui ? Cela est réellement provocateur de la part de…