Distribution en France : Enjeux et mutations d’un secteur contraint à évoluer
Secteur économique phare, la distribution est à la croisée d’enjeux politiques, comme en témoignent les récentes mesures gouvernementales. Un nouveau paysage se dessine, dans lequel les distributeurs doivent s’adapter. Quelles sont les marges de manœuvre à leur disposition ?
L’analyse de Franck Lheureux, Directeur dumarché Distribution, SAS France.
Quels sont les éléments majeurs qui forment le contexte actuel du secteur de la distribution en France ?
Le contexte dans lequel évoluent les acteurs de la distribution en France est marqué par plusieurs changements majeurs, dont le plus important est d’ordre législatif et réglementaire, avec l’adoption de la Loi Dutreil-Jacob puis la signature des AccordsSarkozy.
L’objectif est d’arrêter la dynamique inflationniste à laquelle avait indirectement contribué la Loi Galland avec le développement des marges arrières. La nouvelle loi bloque à 20% les montants totaux des remises arrières, ce qui se traduit par un manque à gagner immédiat pour la grande distribution. De plus, le cadre légal dans lequel s’opèrent les négociations est renforcé, avec l’obligationde signer un contrat pour toute prestation fournisseur-distributeur. Enfin, on applique le principe du renversement de la charge de la preuve, qui incombe désormais au distributeur.
De leur côté, les Accords Sarkozy visent à redonner du pouvoir d’achat au consommateur, et engagent les distributeurs à baisser de 1 à 2% le prix du panier moyen, et de fait, les principaux instituts d’étude relèventdéjà une diminution de 0,5 à 1% de ce panier constitué des produits à haute fréquence d’achat.
Globalement, en adoptant ces mesures, le gouvernement souhaite ainsi favoriser le petit commerce et le client final.
Au-delà du nouveau contexte législatif et réglementaire, quels sont les autres changements auxquels doivent faire face les distributeurs ?
Sur le plan économique, nous assistons audéveloppement des magasins de proximité, à une montée en expertise de la distribution spécialisée, de plus en plus dynamique, et à la forte croissance du « hard discount ». Les deux derniers éléments peuvent d’ailleurs se conjuguer : des distributeurs spécialisés comme Castorama ou Leroy Merlin investissent de plus en plus dans des enseignes premier prix. Il en va de même dans l’univers de la mode etdu textile.
La grande distribution doit donc faire face à un univers concurrentiel de plus en plus agressif. Parallèlement, les consommateurs, mieux informés, sont aussi de plus en plus volatils. La relation des clients aux marques a beaucoup évolué, contraignant industriels et distributeurs à une inflation du portefeuille produits présenté en linéaires.
Quelles en sont les implications pour lagrande distribution ?
L’ensemble de ces évolutions obligent les distributeurs à ce recentrer sur la relation client, alors que jusqu’à présent, c’était la relation fournisseur qui mobilisait leur attention. Il s’agit en quelque sorte d’un retour aux fondamentaux que sont la satisfaction client et l’excellence opérationnelle dans les modes de gestion. Autant dire, un tournant majeur qui se dessineactuellement !
Comment se situe cette évolution du secteur de la distribution en France par rapport à nos voisins européens ?
En réalité, le mouvement général est celui d’une déréglementation du marché qui doit bénéficier au client final en lieu et place de la sacro-sainte relation distributeur-fournisseur. Les impacts de la Loi Dutreil-Jacob et des Accords Sarkozy devraient ainsi rapprocher laFrance des modèles anglo-saxon ou allemand.
Dans ce cadre, quels sont les axes majeurs qui doivent orienter les stratégies des distributeurs ?
Dans ce nouveau contexte économique et réglementaire, les distributeurs doivent développer leur chiffre d’affaires par client en s’appuyant sur le CRM analytique et opérationnel, et en optimisant le pilotage et la gestion des marchandises. Il s’agit…