Qu’implique la notion de continuité du service public ?
Le service public a été créé pour faire face, non à un caprice, mais à un besoin d’intérêt général. Par définition, ce besoin est continu. En conséquence, le service public doit fonctionner sans solution de continuité, sans interruptions intempestives. Le principe de continuité s’accommode des interruptions fondées sur les textes,l’intérêt général ou la nature des choses. Pour le Conseil constitutionnel, la continuité du service public constitue un principe de valeur constitutionnelle, selon le Conseil d’État, il s’agit d’un principe fondamental. Le principe de continuité met aux prises tout à la fois l’administration, son personnel, ses co-contractants et les administrés. Les implications sont importantes pour lefonctionnement de fait du SP, puisque la recherche de la satisfaction continue de l’intérêt général est à la base de nombreuses prérogatives exorbitantes du droit commun pour les pouvoirs publics. Elles sont également importantes pour l’organisation du SP, car la recherche continue de la satisfaction de l’intérêt général impacte sur les mesures d’organisation du fonctionnement du SP, tant en période normale,qu’en période exceptionnelle.
I Continuité du SP et préservation de l’intérêt général : les prérogatives exorbitantes de la puissance publique
La continuité du service public et la préservation de l’intérêt général sont à la base de nombreuses théories du droit public accordant aux autorités administratives des prérogatives exorbitantes du droit public.
A / L’administrationface à ses co-contractants
Le concessionnaire d’un service public doit assurer, de manière régulière, le service public qui lui a été délégué. Il n’est libéré de cette obligation que par la force majeure ou le comportement de l’administration rendant impossible l’exécution du service. Hors ces cas, interrompre le service public est une faute pouvant entraîner la déchéance duconcessionnaire
Dans le cadre général de l’exécution d’un contrat administratif, la théorie de l’imprévision prévoit que, le cocontractant de l’administration doit poursuivre l’exécution du contrat même si survient un événement imprévisible et temporaire qui la rend plus difficile. L’intérêt défendu par l’administration a la primauté puisqu’il s’agit de l’intérêt général. Le contrat dont l’exécutiondevient incertaine intéresse toujours le service public, qui ne doit pas cesser de fonctionner. C’est en se fondant sur l’intérêt du service public et le principe de sa continuité qu’en droit administratif, on retient l’idée d’imprévision.
Les juridictions administratives ont été néanmoins conduites à tempérer, dans certains cas, les effets de l’obligation impérative qui pèse sur letitulaire d’un marché public d’en poursuivre l’exécution, sauf cas de force majeure. Ainsi, dans l’hypothèse où certaines circonstances économiques ont entraîné le bouleversement de l’économie d’un contrat, elles ont admis que l’administration participe sous forme d’une indemnité aux pertes qu’il a subies, sans pour autant garantir un bénéfice au titulaire. Il faut que l’événement perturbateur :
-n’ait pu raisonnablement être prévu par le titulaire du marché ;
– qu’il ait été indépendant de la volonté du titulaire du marché ;
– qu’il ait occasionné des charges supplémentaires, généralement qualifiées d’« extra-contractuelles » parce que non prévues lors de la conclusion du contrat, entraînant le bouleversement de son économie.
Lorsque le bouleversement de l’économie ducontrat est établi, le titulaire du marché peut obtenir une indemnité.
B / L’appréciation circonstanciée de la légalité des actes de l’administration
(1) La reconnaissance de la légalité des actes pris en période exceptionnelle
Par l’arrêt Heyriès , le Conseil d’État admet qu’en période de crise, voire, comme dans le cas de l’espèce, en période de guerre, la puissance publique…