La construction identitaire pendant l’enfance
Nous savons que la vie psychique du nouveau né commence par une fusion corporelle avec sa mère. Celle-ci est telle que le nouveau né conçoit l’adulte nourricier comme une unité indivisible, un être qui fait partie intégrante de lui.
Dans le même temps , ce sont ces mêmes interactions qui vont lui permettre d’accéder à un sentiment d’unité.Donald Winnicott nous a d’ailleurs montré que la qualité de ces relations précoces seraient décisives dans l’élaboration narcissique de l’enfant. Il a ainsi établi un lien entre les soins de la petite enfance et la construction identitaire à partir de trois processus conjoints :
« -L’intégration du Moi dans le temps et l’espace dépend de la façon pour la mère de tenir le nourrisson .
-Lapersonnalisation du Moi dépend de la façon de le « soigner ».
-L’instauration par le Moi de la relation d’objet dépend de la présentation par la mère des objets (seins,biberons…)grâce auxquels le nourrisson va pouvoir trouver la satisfaction de ses besoins. »[1]
Le développement identitaire est donc possible si le « vrai self », désignant la sensation qu’a l’enfant d’une réelle communion entre son corpset son esprit , s’élabore par à un maternage bien prodigué donnant à l’enfant un sentiment de sécurité interne.
La mère, en répondant aux besoins de son petit, lui donne ainsi la possibilité d’accéder dans sa vie future à une intégrité de son image corporelle et psychique.
La peau va également jouer un rôle essentiel dans la construction identitaire .
Celle-ci permet à l’individu de faire ladistinction entre soi et l’extérieur en délimitant les contours du corps mais devient également un moyen de communication avec l’environnement.
Cette notion, intitulée le « Moi – Peau » par Didier Anzieu, a longuement été développée par celui-ci : « Par Moi-Peau je désigne une figuration dont le Moi de l’enfant se sert au cours des phases précoces de son développement pour se représenterlui-même comme Moi contenant les contenus psychiques, à partir de son expérience de la surface du corps . Cela correspond au moment où le Moi psychique se différencie du Moi corporel sur le plan opératif et reste confondu avec lui sur le plan figuratif. »[2]
Selon D. Anzieu, le « Moi- Peau » s’organiserait donc autour de trois fonctions de la peau : maintenir à l’intérieur ce qui est bon pour lesujet, délimiter l’intérieur et l’extérieur par une barrière protectrice bloquant l’intrusion des agressions externes, et enfin construire un lieu d’échange et établir des relations signifiantes.
Après quelques mois, l’enfant va amorcer son premier mouvement narcissique par l’intermédiaire du miroir et la reconnaissance progressive de soi.
Il va alors se chercher , commencer à se contempler,et finir par apprivoiser l’image renvoyée avec une certaine fascination.
Cette étape définit en psychanalyse comme « le stade du miroir » va tenir un rôle essentiel à son tour dans la constitution de l’ identité de l’enfant âgé de 6 à 12 mois.
C’est à partir de cette expérience qu’il se reconnaît et se considère comme une personne unique et unifiée et ceci en trois phases :
– La premièreest la perception par l’enfant de son reflet dans le miroir , période pendant laquelle il confondra l’image qu’il voit avec une personne réelle « autre » .
– La seconde amène l’enfant à comprendre que l’image n’est en fait qu’un reflet et non cette personne réelle « autre » .
-Enfin, la troisième lui fait prendre conscience que le reflet qu’il perçoit est son image, et donc une représentation delui-même.
Comme nous le voyons, le corps joue un rôle important dans la structuration de l’identité puisque son image sert de médiateur à la constitution du « Je ».
Avant ce stade, le corps de l’enfant était morcelé et il ne parvenait pas à s’éprouver en tant qu’objet séparé du monde extérieur.
D’autre part, l’autre, par son regard, lui a permis de développer un sentiment d’identité…