La courbe de tes yeux fait le tour de mon coeur,
Un rond de danse et de douceur,
Auréole du temps, berceau nocturne et sûr,
Et sije ne sais plus tout ce que j’ai vécu
C’est que tes yeux ne m’ont pas toujours vu.
Feuilles de jour et mousse de rosée,
Roseaux duvent, sourires parfumés,
Ailes couvrant le monde de lumière,
Bateaux chargés du ciel et de la mer,
Chasseurs des bruits et sourcesdes couleurs,
Parfums éclos d’une couvée d’aurores
Qui gît toujours sur la paille des astres,
Comme le jour dépend de l’innocenceLe monde entier dépend de tes yeux purs
Et tout mon sang coule dans leurs regards.
Paul ELUARD, Capitale de la douleur, (1926)Paul Eluard, poète de la première moitié du XXème a été un des piliers du surréalisme qui s’intéresse à l’imaginaire, au rêve et àl’inconscient dans les années 1920. Après une crise personnelle existentielle qui a entraîné son voyage-fuite en 1924, Eluard publie sonpremier recueil en 1926, qui sera le plus important: Capitale de la douleur. Ce recueil est dédié à sa muse: Gala.
Le poème Lacourbe de tes yeux est l’avant dernier du recueil. Il est placé sous le signe de la joie d’aimer et du partage amoureux. Nous allons étudierl’éloge de la femme fait à partir de la courbe de ses yeux, puis le bonheur de ce couple heureux et enfin l’ouverture sur le monde.