La méthode de la dissertation
La dissertation relève d’un savoir-faire c’est à dire d’une technique. Il est impossible, dans ces conditions, de donner des principes qui vous permettront de réussir du premier coup et à tout coup. Pensez bien que si tel était le cas tous les candidats au baccalauréat obtiendraient la note maximale à l’examen. On apprend à faire des dissertations… en en faisant.C’est la raison pour laquelle nous allons ensemble examiner un sujet en regardant pratiquement comment procéder, étape par étape.
L’analyse du sujet
Soit donc le sujet : Faut-il être seul pour être soi-même ?
J’imagine que certains ont déjà envie de répondre par oui ou par non… C’est exactement ce qu’il faut éviter de faire. Comment répondre en effet à une question sans savoir précisément cequi nous est demandé ? La dissertation est d’abord un exercice de lecture et lire n’est pas seulement déchiffrer des mots mais chercher à comprendre, le crayon à la main, ce qui est précisément écrit. Avant de répondre à une question, il faut l’interroger car elle n’est jamais simple. Ainsi, pour notre sujet : qu’est-ce que signifie être seul ? N’y a-t-il pas plusieurs sens à cette expression ?Que veut dire être soi-même ? Le verbe falloir n’a-t-il pas plusieurs sens en français ? etc. C’est pour cela qu’il faut respecter scrupuleusement les étapes suivantes :
Repérer d’abord, en les soulignant, les mots et expressions clef et entourer les mots qui donnent sens à la question. Dans notre exemple, nous obtenons le résultat suivant :
Définir très précisément les mots et expressionssoulignés. Être seul, c’est bien sûr être sans les autres mais la solitude peut revêtir des formes très diverses :
Il y a d’abord la solitude volontaire et temporaire de celui qui s’isole quelques minutes, voire quelques heures mais en vivant ordinairement avec les autres
Il y a ensuite la solitude toujours volontaire mais durable de l’ermite qui s’isole pour de nombreuses années
Il y a lasolitude involontaire de Robinson qui, à la suite d’un naufrage, se retrouve sur une île déserte pendant 20 années mais après avoir connu l’éducation que procure une existence sociale
Il y a la solitude involontaire de l’enfant sauvage qui commence dès la petite enfance
Enfin, pourquoi ne pas envisager aussi ce cas très particulier de solitude qu’est l’autisme quand l’individu se trouve isolédes autres dans la forteresse que crée la maladie mentale ?
On le voit une réponse trop rapide qui ignore l’interrogation nécessaire du sujet nous aurait fait passer à côté de biens des aspects de notre question.
Qu’est-ce, maintenant, qu’être soi-même ? L’expression est paradoxale. Puis-je être autre chose que moi-même ? Etre soi-même, c’est d’abord être son être propre, authentique, pensant etagissant librement et non comme les autres. Être soi-même, c’est être le sujet de ses pensées et actions et non en train de copier, d’imiter autrui. Se pose donc la question de la coïncidence avec soi-même sans contamination par la personnalité d’autrui. Etre soi-même, c’est ne pas être aliéné puisque l’aliénation est la perte de soi dans un autre. Dans l’aliénation mentale, par exemple, le foun’est plus lui-même. Mais on peut aussi parler de l’aliénation sociale, du conformisme qui fait que chacun perd son authenticité dans le nivellement social. Les passions aussi peuvent être aliénantes. Ne dit-on pas de l’homme en colère qu’il est « hors de lui » et celui-ci s’excuse après coup : « je n’étais plus moi-même, je ne savais plus ce que je faisais ». Être soi-même, c’est donc aussi se dominer,se maîtriser.
Définir les expressions et mots entourés. Dans notre exemple, qu’est-ce que signifie « faut-il »? Le verbe falloir a deux sens en français. Il peut signifier « être nécessaire » (est-il nécessaire d’être seul pour être soi-même ?) ou « être de mon devoir de » (est-il de mon devoir d’être seul pour être moi-même ?). On voit aisément que le sens moral importe peu ici. La question posée…