Comme Meursault, Yalo est aussi victime de la société. Mais, au cœur du roman, il y a l’identité du héros, qui est morcelée, aléatoire, insaisissable. Peut-on y voir une représentation de l’identitéd’un peuple libanaise? On pense que la maladie libanaise est la maladie identitaire. De manière générale, l’identité est une maladie car il n’en existe pas de fixe, d’authentique. Cela est confirmépar ce que Elias Khoury a dit dans un entretien:
« Il faut se battre contre cette idée, l’une des plus fascisantes qui soit. Quelle que soit la vérité, reste leur opposition à l’authentique, àl’identité car seul existe le mélange. »
Yalo découle de cette idée. Le grand-père de Yalo est un chrétien syriaque qui, élevé par un Kurde musulman, en a partagé la langue et la religion (l’islam), avant derevenir au christianisme et au syriaque. Yalo lui-même, bien que syriaque, en maîtrise très mal la langue : il parle l’arabe dialectal, lit des romans historiques en arabe classique. En écrivant sonhistoire, Yalo découvre, et fait découvrir au lecteur, que son identité est multiple. Mais la démarche de Yalo consiste aussi à quitter le terrain de l’identité pour aller à la rencontre des autres.« Comme le Christ sur le lac
je marche dans ma vision
Je suis descendu de la croix pourtant
car j’ai le vertige des hauteurs
et je n’annonce pas la résurrection »
Cette citation de lapoésie de Mahmoud Darwich provoque nos sens et nos sentiments, nous traitons avec une tragédie humaine. Cette tragédie ne se termine pas par le salut comme dans le message du Christ, mais elle tented’y arriver. Dans la citation, C’est le salut qui n’existe pas parce que « le Rédempteur » est descendu de la croix pour deux raisons ordinaires, humaines et très raisonnables: la peur de la hauteur etne pas annoncer la résurrection. C’est-à-dire qu’il n’est pas un prédicateur religieux ou un missionnaire. La résurrection est l’une des bases de la foi religieuse dans les religions célestes. Au…