La profession de foi du vicaire savoyard
Citations importantes
*En l’instruisant sur la controverse, on lui donna des doutes qu’il n’avait pas, et on lui apprit le mal qu’il ignorait. p45
*Il vit que la mauvaise fortune avait déjà flétri son coeur, que l’opprobre et le mépris avaient abattu son courage, et que sa fierté, changée en dépit amer, ne lui montrait dans l’injustice et la dureté deshommes que le vice de leur nature et la chimère de la vertu p46
*Il avait vu que la religion ne sert que de masque à l’intérêt, et le culte sacré de sauvegarde à l’hypocrisie ; il avait vu, dans la subtilité des vaines disputes, le paradis et l’enfer mis pour prix à des jeux de mots ; il avait vu la sublime et primitive idée de la Divinité défigurée par les fantasques imaginations des hommes p46* l’incrédulité, la misère, étouffant peu à peu le naturel, l’entraînaient rapidement à sa perte, et ne lui préparaient que les mœurs d’un gueux et la morale d’un athée. P47
* l’opprobre où l’avait réduit la fortune étouffait en lui tout vrai sentiment du bien et du mal. P48
* il voyait les pauvres gémir sous le joug des riches, et les riches sous le joug des préjugés. P50
* ma pauvretém’éloignait des tentations qui dictent les sophismes du vice p52
* Voyant par de tristes observations renverser les idées que j’avais du juste, de l’honnête, et de tous les devoirs de l’homme, je perdais chaque jour quelqu’une des opinions que j’avais reçues p52
*Je méditais donc sur le triste sort des mortels flottant sur cette mer des opinions humaines, sans gouvernail, sans boussole, et livrés àleurs passions orageuses, sans autre guide qu’un pilote inexpérimenté qui méconnaît sa route, et qui ne sait ni d’où il vient ni où il va. P53
*Il n’y en a pas un seul qui, venant à connaître le vrai et le faux, ne préférât le mensonge qu’il a trouvé à la vérité décou verte par un autre. Où est le philosophe qui, pour sa gloire, ne tromperait pas volontiers le genre humain ? p55
*Le tableau de lanature ne m’offrait qu’har monie et proportions, celui du genre humain ne m’offre que confusion, désordre! Le concert règne entre les éléments, et les hommes sont dans le chaos! Les animaux sont heureux, leur roi seul est misérable! O sagesse, où sont tes lois ? O Providence, est-ce ainsi que tu régis le monde ? Être bienfaisant, qu’est devenu ton pouvoir ? Je vois le mal sur la terre. P70
*laProvidence(…) ne veut point le mal que fait l’homme, en abusant de la liberté qu’elle lui donne ; mais elle ne l’empêche pas de le faire, soit que de la part d’un être si faible ce mal soit nul à ses yeux, soit qu’elle ne pût l’empêcher sans gêner sa liberté et faire un mal plus grand en dégradant sa nature. Elle l’a fait libre afin qu’il fît non le mal, mais le bien par choix. P74
*Le mal quel’homme fait retombe sur lui sans rien changer au système du monde, sans empêcher que l’espèce humaine elle-même ne se conserve malgré qu’elle en ait. Murmurer de ce que Dieu ne l’empêche pas de faire le mal, c’est murmurer de ce qu’il la fit d’une nature excellente, de ce qu’il mit à ses actions la moralité qui les ennoblit, de ce qu’il lui donna droit à la vertu. P75
*C’est l’abus de nosfacultés qui nous rend malheureux et méchants. Nos chagrins, nos soucis, nos peines, nous viennent de nous. Le mal moral est incontestablement notre ouvrage, et le mal physique ne serait rien sans nos vices, qui nous l’ont rendu sensible p75
* Si nous nous contentions d’être ce que nous sommes, nous n’aurions point à déplorer notre sort ; mais pour chercher un bien-être imaginaire, nous nous donnonsmille maux réels. P76
*Homme, ne cherche plus l’auteur du mal ; cet auteur, c’est toi-même. Il n’existe point d’autre mal que celui que tu fais ou que tu souffres, et l’un et l’autre te vient de toi. Le mal général ne peut être que dans le désordre, et Je vois dans le système du monde un ordre qui ne se dément point. Le mal particulier n’est que dans le sentiment de l’être qui souffre ; et ce…