« L’épaisseur du monde »
de François Heisbourg
L’objet du livre de François Heisbourg est de donner sa vision de la géopolitique mondiale des prochaines années en s’appuyant sur l’analyse des relations internationales antérieures. Il défend la thèse d’une universalisation de l’identité occidentale parallèlement à la disparition de l’Occident comme acteur stratégique. Ainsi, même si laChine devient une superpuissance (ce qu’elle est en phase de devenir, selon l’auteur), cela ne signifie pas que le monde sera asiatique. En fait, la notion de puissance est en train de changer. En effet, auparavant, un pays était hégémonique si il avait une force militaire et politique. Mais aujourd’hui la puissance de la Chine ne peut pas s’analyser comme ceci. Nous expliciterons ce point. Quant autitre de l’ouvrage, il renvoie à la multiplicité et à la complexité des relations entre les États, mais aussi entre et avec les nouveaux acteurs transnationaux (FMN, ONG…), ainsi qu’aux défis planétaires.
L’ouvrage est divisé en cinq grandes parties. La première évoque la naissance et l’évolution de la mondialisation, la seconde la remise en cause de l’hégémonie américaine, la troisième leparadoxe de la puissance chinoise, la quatrième l’épaisseur du monde en tant que tel, c’est-à-dire les relations internationales, et la cinquième s’interroge sur un futur gouvernement du monde.
François Heisbourg commence par rappeler que le terme de « mondialisation » date de 1960 même si le phénomène est bien plus ancien. Il distingue en effet trois phases de mondialisation : celle dela préhistoire avec la sortie des homo sapiens d’Afrique, celle des Grandes Découvertes aux 15e et 16e siècles, et celle de l’industrialisation du 19e siècle. Cette dernière phase, bien que souvent rapprochée de la mondialisation actuelle, en est très différente. Elle s’appuie en effet essentiellement sur des liens d’interdépendance économique de nature matérielle (exploitation de ressourcesphysiques). Le monde d’avant 1914 était de plus dominé par des empires (que ce soient des empires coloniaux avec une métropole, ou des empires multinationaux) et non par des États comme aujourd’hui. Cette mondialisation euro-centrée a été ébranlée par la décolonisation et la fragmentation des empires, puis par les deux Guerres mondiales.
La Guerre Froide (GF) est une autre étape dansl’évolution de la mondialisation. En effet la mondialisation n’était pas vraiment mondiale, car le monde était scindé en deux blocs. Les échanges commerciaux ont donc diminué sans que la production diminue, ce qui a provoqué une forte augmentation des PIB allemand, japonais, britannique et américain. De plus, la GF a provoqué une amélioration des technologies de transport et d’information qui ont conduit à lamondialisation actuelle. Cette période a également vu l’augmentation du rôle régulateur de l’Etat dans l’économie avec l’apparition de l’Etat providence. L’Etat est donc le principal acteur de l’économie, rôle qu’il va perdre peu à peu. À la chute de l’URSS, l’espace d’échanges s’élargit considérablement. De nouveaux pays apparaissent dans le commerce mondial : les « dragons » et les « tigres »asiatiques.
La mondialisation actuelle s’appuie sur la révolution de l’information (caractérisée par trois termes : électronique, informatique, réseaux) et les institutions de Bretton Woods qui ont pour but de prévenir une crise systémique.
Lorsqu’on évoque la mondialisation actuelle, il est impossible d’occulter le rôle des Etats-Unis. Pourtant, l’auteur prévoit qu’à l’avenir lesEtats-Unis (EU) ne pourront plus structurer le système international comme ils le faisaient. Leur hégémonie s’efface peu à peu.
Pour expliquer cette thèse, François Heisbourg revient sur les sources de la puissance américaine, en évoquant la formation de ce pays au 18e siècle. Il rappelle que les EU se sont « formés sur un projet », qu’ils comptaient diffuser, comme l’indique la…