Les contes : utilité ou gratuité ?

Dissertation cours 1 b – Le conte en ses métamorphoses – Madame Patricia Lojkine Rédigée par Stéphanie Cavril Sujet :
Les extraits critiques suivants débattent de la question de l’utilité ou de la gratuité du conte de fées, de sa fonction ou de son « a-fonctionnalité », de sa signification ou de son insignifiance. Je vous propose d’entrer à votre tour dans le débat. Vous vous inspirerez de cespropos divers et divergents pour proposer une argumentation sur ce thème. Vous vous appuierez sur des lectures théoriques, des considérations historiques et éventuellement des expériences pratiques de réception (devant un auditoire adulte ou enfantin), et vous relirez les textes du corpus à la lumière de ce sujet, sans négliger les préfaces, les moralités, les « devis » (commentaires des locuteursautour de l’histoire).

Voici donc les quatre extraits qui formeront la base de votre réflexion : Extrait 1 : Jean-Paul Sermain, Le conte de fées du classicisme aux Lumières, Paris, Desjonquères, 2005, p. 154 : « Peu légitime dans le système contemporain de la critique, moins que le roman encore, tout conte de fées est problématique dans son existence même : l’attachement qu’il suscite tient duparadoxe car on ne sait pas pourquoi il a été écrit ou lu. L’organisation polyphonique du conte fait qu’il intègre dans son propos cette conscience critique et ce soupçon d’insignifiance : il donne place à sa propre parodie. […] La dimension parodique intrinsèque au conte a pour effet d’impliquer le lecteur dans une aventure douteuse, de susciter une sorte de malaise à l’égard de son origine naïveou grossière et du pouvoir accordé aux désirs. » Extrait 2 : Jack Zipes, Les contes de fées et l’art de la subversion, trad. fr. F. Ruy-Vidal, Paris, Petite bibliothèque Payot, 1986, rééd. 2007 (Fairy Tales and The Art of Subversion, Londres, 1983), p. 13 et 25 : « […] des auteurs cultivés se sont délibérément approprié, à une certaine époque, le conte oral de tradition populaire et l’ontconverti en un type de discours littéraire, nourri des mœurs, pratiques et valeurs de cette époque, en vue d’obtenir que les enfants entrent plus facilement dans la civilisation régie par les codes sociaux en vigueur. […] Il y a assurément un danger à trop considérer l’écriture du conte de fées pour enfants en termes de manipulation. Si tel avait été son rôle principal, ou sa seule fonction, on pourrait,à juste titre, accuser le genre entier d’avoir opéré une machination. Ce qui n’est pas le cas. Cependant, comme j’ai tenté de le démontrer, alors qu’il commençait à se constituer en tant que genre, on peut dire que le conte de fées pour enfants prit de plus en plus le tour d’un discours institutionnalisé incluant parmi ses composantes la manipulation. » Extrait 3 : Bruno Bettelheim, Psychanalysedes contes de fées, trad. fr. T. Carlier, Paris, R. Laffont, 1976 (The Uses of Enchantment, 1976), coll. Bouquins, p. 137 (« De l’utilité de l’imagination ») : « Les contes de fées ne prétendent pas décrire le monde tel qu’il est ; ils ne donnent pas davantage de conseils sur ce qu’il convient de faire. […] Les vertus thérapeutiques du conte de fées viennent de ce que le patient trouve ses propressolutions en méditant ce que l’histoire donne à entendre sur lui-même et sur ses conflits internes à un moment précis de sa vie. » Extrait 4 : François Flahaut, La pensée des contes, Paris, Anthropos, 2001, p. 45 : « Le conte, encore une fois, n’agit pas sur nous comme une parabole débouchant sur une leçon. En fait, comme tous les récits de fiction, il exerce une action ambiguë : il apporte uneexpression aux désirs excessifs ou destructeurs qui nous habitent, et en même temps nous invite à nous contenter d’un semblant de cette démesure […]. Un récit parfaitement moral, c’est-à-dire sans violence, sans démesure, sans aucune expression du mal retirerait du même coup à ses auditeurs, lecteurs ou spectateurs la racine du plaisir qu’ils en tirent. Cette racine, c’est le lien entre le…