En 1020, l’évêque Fulbert de Chartres fit parvenir, à sa demande, aux glorieux duc d’Aquitaine Guillaume (Guillaume V le Grand) une lettre relative à la notion de fidélité. Cette » lettre de Fulbert de Chartres », de style épistolaire, est un texte privé et subjectif. Fulbert de Chartres est un ecclésiastique français (Italie : 960 – Chartres : 1028). Il fut nommé évêque de Chartres par Robert lePieux en 1006.
La période du Xe à la fin du XIe siècle est caractérisée, d’un point de vue général, par une profonde réduction de la courbe démographique. La vie économique est en régression, c’est une économie domaniale recroquevillée dans un cadre seigneurial et dominée par la consommation locale, où le commerce se tarit progressivement. De plus, le droit est presque entièrement coutumier, cequi entraîne une extrême diversité locale et un flottement dans les règles juridiques ; puis, il existe une réelle mobilité sociale provoquant ainsi une diversité concernant les statuts juridiques.
Cette même période, sur le plan politique, est également caractérisée par la disparition du pouvoir central et dont les attributs, du pouvoir politique, sont accaparés par une multitude de seigneurs :le cadre de vie se restreint à la seigneurie.
Enfin, d’un point de vue religieux, l’église souffre de nombreux désordres internes auxquels elle tente de remédier à en entamant une entreprise de réorganisation : la réforme grégorienne.
Au cours de cette période, ce sont donc les liens individuels qui priment sur l’attachement à la royauté capétienne. La société féodale se développe sur la basede rapports d’hommes à hommes tels que le lien servile et plus particulièrement dans cette lettre, le lien vassalique. La vassalité est donc caractérisée par un engagement personnel du vassal (vassus) envers le seigneur (senior) et par l’attribution d’un bénéfice (c’est-à-dire un fief) au vassal par son seigneur, d’où l’explication de la notion de fidélité par l’évêque Fulbert de Chartres.Qu’est-ce qui caractérise le lien féodo-vassalique ? Quel est l’intérêt de la notion de fidélité selon l’auteur ?
Il ressort de cette analyse deux composantes essentielles, d’une part : le lien féodo-vassalique c’est-à-dire les obligations mutuelles et leurs sanctions concernant tant le vassal que son seigneur ( I ) ; et d’autre part, la notion de fidélité selon l’auteur ( II ).
I – Le lienféodo-vassalique : les obligations mutuelles et leurs sanctions
La vassalité résulte d’un contrat par lequel un homme, le vassal, devient le dépendant d’un autre homme : le seigneur. Ce contrat va contraindre le vassal à des obligations sous peine de sanctions (A) mais également le seigneur du vassal (B).
A – Les obligations unilatérales et leurs sanctions concernant le vassal
Dans cettelettre, l’auteur, Fulbert de Chartres, donne « au glorieux duc d’Aquitaine » un inventaire des obligations négatives, celles de ne pas nuire, qui résultent du serment de fidélité.
Selon Fulbert « celui qui jure fidélité à son seigneur doit toujours avoir présent à la mémoire ces six points : salut, sécurité, honneur, intérêt, facilité et liberté d’action »., ainsi, le vassal est objet de respecter ces sixpoints afin de ne pas nuire à son seigneur dans la mesure où le vassal doit être fidèle à son seigneur, c’est-à-dire qu’il ne doit pas manquer à ses engagements.
Tout d’abord, le vassal doit à son seigneur le « salut »c’est-à-dire que le vassal ne doit pas porter d’atteinte ou de tort à la personne de son seigneur « dans son corps », ce qui signifie que le vassal ne doit pas porter atteinte àl’intégrité physique du seigneur dans le rang, le statut juridique que ce dernier occupe.
Ensuite, le vassal doit garantir « la sécurité »de son seigneur ; en effet, le vassal se doit de tenir au secret tout ce qui concerne son seigneur afin que ce dernier soit en « sûreté »c’est-à-dire à l’abri d’un éventuel danger comme une attaque par exemple. Ainsi, le seigneur doit se sentir confiant et tranquille…