LETTRE DE KEBA MBAYE A SON FILS
par Mbaye Diouf, vendredi 2 juillet 2010, à 21:06
Commencer à le rédiger me fut pénible, m’arrachait de silencieux sanglots. J’ai finalement retenu de simplementrendre publique cette lettre qu’il m’adressa il y a 25 ans. Je venais, à 29 ans, d’être nommé Président-directeur général de la Banque de l’Habitat du Sénégal. Lourdes responsabilités pour un si jeuneâge. Je suis sûr de devoir ma réussite, si elle a existé, aux mots qu’elle contient.
Mon frère et mes sœurs la découvriront en même temps que votre lecteur. Elle fut si longtemps un secret entre luiet moi.
Mais quelle belle leçon de management ! Il était alors juge à la Cour internationale de Justice.
Merci, M. le Juge. Merci à mon père.
Abdoul MBAYE
Mon fils,
«Paris le 28 août1982
Mes félicitations ! Que Dieu t’aide à porter ta lourde charge. Qu’il te protège contre le mal et t’inspire à chaque instant afin que toujours tu suives la voie du bien.
J’ai confiance.Néanmoins je ne peux m’empêcher de te donner quelques conseils en de telles circonstances. D’ailleurs tu en entendras bien d’autres. Il faut en prendre et en laisser. Au Saloum on dit que quant unsaloum-saloum te dit : «Faa lay waxal !» Méfie toi «waxal lu la. Bopam lay waxal.» Il faut donc écouter tout le monde, et prendre ta décision seul.
Je n’attendrai pas aujourd’hui pour te faire une leçon demorale. Tu n’en as jamais eu besoin. Je suis donc sûr que tu ne vas pas changer. Mais je vais te livrer quelques remarques. Il ne s’agit guère des fruits d’une réflexion, mais du résultat d’unelongue expérience de responsabilités. Je te le sers sans ordre :
N’aie confiance en personne à commencer par moi. Ne fais jamais rien d’important sans en discuter avec ton épouse. Il ne s’agitévidemment pas de faire ce qu’elle te dit, mais de prendre son avis. Prends aussi d’autres avis en ayant toujours en tête que ce que tu dis à un étranger sera répété, et parfois déformé. Reste simple. Mais…