Liberté d’expression et présomption d’innocence

LIBERTE D’EXPRESSION ET PRESOMPTION D’INNOCENCE

Initialement restreint aux rapports entre l’accusé et ses juges, le principe de la présomption d’innocence a vu son champ d’application s’élargir concurremment au développement des médias. Consacré à l’article 9-1 du Code civil depuis la loi du 4 janvier 1993, le principe de la présomption d’innocence peut être identifié dans diverses sources, cequi en traduit l’importance. On le retrouve en effet à l’article à l’article 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyens de 1789 (DDHC), ainsi qu’à l’article 6§2 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH).

A été substitué au sens premier de cette notion, qu’est la prohibition de prononcer une condamnation sans avoir prouvé la culpabilité de l’accusé, une conceptionbien plus large. En effet, il ne s’agit plus de protéger uniquement l’accusé du regard éventuellement partial du juge, mais du regard de la société tout entière.

Proclamée comme principe au niveau constitutionnel, international et européen, la protection de la présomption d’innocence est à concilier avec le respect de la liberté d’expression. Il s’agit du droit pour toute personne de pensercomme elle le souhaite et de pouvoir exprimer ses opinions par tous les moyens qu’elle juge opportun. Considérée comme une liberté fondamentale, la liberté d’expression est inscrite dans la Déclaration Universelle des Droits de l’homme, en vertu de laquelle « Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions ou celui dechercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit ». On retrouve également ce principe aux articles 10 et 11 de la DDHC, ainsi qu’à l’article 10 de la CEDH.

De même valeur, les principes de présomption d’innocence et de liberté d’expression semblent de prime abord se contredirent. En effet,l’insertion dans le Code civil d’un régime propre de protection de la présomption d’innocence a été vécue par les défenseurs de la liberté d’expression comme une restriction injustifiée de leur droit fondamental.

Face aux dérives de certains médias et à la nécessité de protéger de manière effective les droit fondamentaux d’une personne liée à une affaire pénale, il est nécessaire de se demander si lesprincipes de présomption d’innocence et de liberté d’expression sont conciliables.

De manière à répondre à cette problématique, sera étudié, tout d’abord, le fait que l’instauration d’un régime particulier de protection de la présomption d’innocence est une nécessité discutée (I). Ensuite, seront exposées les conséquences de ce régime sur la liberté d’expression, où la recherche d’un équilibres’avère essentielle (II).

I- Le régime particulier de la protection de la présomption d’innocence : entre nécessité et inefficacité

L’instauration d’un régime particulier dans le Code civil relatif à la présomption d’innocence, ainsi que les retouches qui y ont été successivement apportées, ont permis de renforcer la protection de ce principe (A). Demeurent cependant quelques incohérences, quien font un régime dont la portée est discutable (B).

A) Une protection renforcée de la présomption d’innocence

Face au développement massif des médias au cours du 20ème siècle, devenus des acteurs indispensables de notre société, et au besoin de nourrir quotidiennement l’intérêt d’un public, il a été nécessaire d’ériger un corpus de règles destiné à protéger les personnes susceptibles defaire l’objet d’une « médiatisation ». Ainsi, afin de mettre un terme au conflit opposant la presse à la justice, le législateur, par la loi du 4 janvier 1993, a appréhendé le problème du droit à l’information dans son ensemble. C’est donc à l’occasion de la réforme du Code de procédure pénale qu’a été introduit dans le Code civil un texte visant à protéger la présomption d’innocence et à…