Louise labé sonnet x

commentaire du sonnet X

Le lyrisme est un registre que l’on associe volontiers à l’acte poétique, à tel point que l’on a même tendance à les considérer à tort comme indissociables. Cette idée est également entretenue par l’étymologie du mot : elle évoque en effet la lyre d’Orphée, le prince des poètes, qui par son chant calmait les bêtes sauvages. Il n’en reste pas moins que la poésieest un genre où le lyrisme a souvent sa place. Certaines formes, comme celle du sonnet, lui sont étroitement liées. Ceux de Louise Labé, poétesse lyonnaise du XVIème siècle, illustrent bien cet état de fait. Dans le neuvième sonnet de son recueil, la belle cordière, renverse le topos de l’amant dévoilant ses sentiments à l’être aimé en laissant parler sa voix de femme.
Nb : sonnet= forme fixeextrêmement employée. Il nait en Italie au XIIIème, arrive en France au XVIème et connaît un succès jamais démenti depuis (environ 45 000 sonnets uniquement pour le XVIème français). Le sonnet est composé de deux quatrains (strophes de quatre vers) et de deux tercets (strophes de trois vers). Les vers, en général des alexandrins, obéissent ordinairement, pour les rimes, à la disposition suivante: abba-abba-ccd-ede ou eed. Ils alternent traditionnellement rimes féminines (se terminant par un e muet) et masculines (ne se terminant pas par un e muet). Il y a, généralement, un changement du sentiment assez marqué entre les quatrains et les tercets appelé volte (valable surtout pour le XVIème). La plupart du temps lyrique, il a pu exprimer des sentiments extrêmementvariés. C’est un genre noble du fait de sa difficulté.
Nb : Louise Labé est un personnage mystérieux ; à l’heure actuelle, on doute même de son existence (cf. Louise Labé, une créature de papier, Mireille Huchon, 2006). Elle est censée être une bourgeoise cultivée de Lyon. Fille et épouse d’un cordier, on la surnomme la belle cordière. C’est un esprit libre qui a chanté avec naturel et feu lapassion amoureuse, ses désirs, ses joies et ses douleurs.
Problématique : En quoi le sonnet IX de Louise Labé illustre-t-il le fait que la poésie soit un genre qui peut avoir pour fonction l’expression des sentiments personnels ?
I) Evocation du sentiment amoureux.
A) Le désir.
Il est violent. Impérieux dès le premier vers : « Tout aussitôt » v1. Irrépressible « incontinent »v4. Advd’intensité « tant »v6, « si haut »v7. Il semble qu’il échappe à la volonté de celle qui aime : séparation de son être et de son âme v3 et v12.
Il est total. A la fois charnel et intellectuel : évocation du lit l2 et de la nuit propice aux amants l9 ; en même temps de l’esprit l3 et de l’âme l4. La jonction se fait avec le mot « sein » l5, qui désigne à la fois l’intérieur du corps (renvoyant parlà à une sensation physique) et à l’intime (situation psychologique).

B) La douleur.
Vive. Champ lexical « triste »v3 (sens plus fort qu’en français moderne= extrêmement affligé.), « sanglots »l8, « pauvre »v12. Hyperbole « Que de sanglots ai souvent cuidé fendre. »v8. Si le repos est désiré, c’est peut être que le tourment amoureux est incessant.
Teintée de désespoir et d’inquiétude.Crainte de l’amante de ne pouvoir obtenir ce qu’elle souhaite. Refuge dans le rêve à la fois consolateur et piètre remède. La « pauvre âme » se sent démunie et le sonnet s’achève sur une supplique v14.

II) La poétesse laisse parler sa propre voix.
A) Exaltation du moi.
Omniprésence de la première personne. « je »v1-6-7-8, adj possessif « mon »v2-11, « ma » v12, pron pers « m’ »v5.L’amante est centrée sur ses désirs : « dedans mon sein ».
Elans passionnés : double apostrophe et ponctuation fortev9. De plus allégorie v9-10, Louise Labé convoque des idées (sommeil, repos), la nature (nuit) afin qu’elle se penche sur sa personne. Cela sonne presque comme une invocation à des divinités qui se doivent (utilisation de l’impératif « Continuez »v11, « Faites »v14) de répondre…