CHAPITRE IV. PSYCHOPATHOLOGIE DU NOURRISSON ET DU JEUNE ENFANT (0 à 3 ans)
IV.1. La naissance
A la naissance, les parents vont devoir accueillir l’enfant réel et lui donner sa place. Cette tâche n’est pas simple car, « il y a trois enfants qui arrivent ensemble au moment de la naissance. L’enfant imaginaire, de leurs rêves et de leurs fantasmes, le fœtus invisible mais réel, dont lesrythmes particuliers et la personnalité se sont faits de plus en plus évidents au fil des mois, et le véritable nouveau-né que l’on peut voir, entendre et enfin tenir tout contre soi[1] »
Pour pouvoir investir l’enfant réel, les parents devront abandonner l’enfant imaginaire : cela n’est pas toujours facile car l’enfant imaginaire peut tout réparer alors que l’enfant réel ne peut pas tout réparer.Ils vont devoir faire le deuil de l’enfant parfait, idéal, et accepter leur enfant tel qu’il l’est réellement. Les parents font là l’expérience prototypique d’une réalité interactionnelle qui demeurera omniprésente par la suite : l’ hiatus entre leur désir d’une part, et l’enfant tel qu’il peut ou/et veut profondément être.
? Hiatus entre le désir d’enfant et ce que l’enfant peut être
Ildemeure malheureusement assez fréquent que des parents s’aveuglent à ce propos, et demandent à l’enfant des performances impossibles, parce que celui-ci n’a pas, ou n’a pas encore, l’équipement pour les mener à bien: par exemple, exigences excessives de rendement intellectuel.
Conséquences fréquentes: beaucoup d’enfants s’épuisent d’abord à essayer de satisfaire leurs parents, n’y arrivent souvent paset passent alors par des idées et des sentiments très pénibles: angoisse d’être grondés; impression de ne rien valoir et d’être méchants parce qu’ils déçoivent leurs parents; sentiment d’incompréhension, d’injustice et colère… Le résultat comportemental, c’est, entre autre, que leur inhibition et leur dysfonctionnement s’accroît: ils ne peuvent même plus prester ce que permettait d’atteindre leniveau actuel de leur équipement.
? Hiatus entre le désir d’enfant et ce que l’enfant veut être
En soi, l’existence d’un désir positif d’enfant est une bonne chose: rien de pire pour celui-ci que de ne pas être attendu, et de devoir «devenir quelqu’un» dans l’indifférence ou l’hostilité.
Néanmoins, la grande majorité des enfants ont, au moins en partie, un projet de vie personnel; ils vontdonc s’avérer ambivalents face à cette focalisation du désir des parents sur eux: ils aiment être aimés… mais pour ce qui est d’être dirigés, c’est moins certain…!
Leurs réactions à l’attente «autre» de leurs parents se répartit sur une échelle qui va du refus clairement exprimé à l’acceptation-adhésion:
1. Enfant tyrannique : les parents sont totalement soumis à l’enfant, par principe oulaisser-aller. Position extrême dans laquelle l’enfant manque totalement de limites et de cadre pour se structurer. Cela Peut provoquer de l’angoisse et un manque de confiance en lui.
2. Négociations : les parents, face au désir de l’enfant, trouveront des compromis. Une négociation réussie nécessite des renoncements et des insistances.
3. Parents autoritaires, dictateurs, qui exercent leurtoute-puissance sur l’enfant; non reconnaissance et/ou non acceptation des différences de l’enfant ; l’enfant se rebelle ou se conforme.
? Effet feed-back sur les parents
À partir de sa manière d’être, et souvent sans le vouloir clairement, chaque enfant exerce un effet feed-back sur le désir d’enfant de ses parents, tel qu’il était constitué jusqu’alors: par exemple, une attitude conforme etsatisfaite renforce les parents dans l’idée de la légitimité de leur désir ; l’opposition, elle, peut avoir deux résultats contraires: soit crisper les parents et rendre leur désir de plus en plus obstiné, soit les faire changer!
Ce travail de prise de conscience, cette réflexion autour du rôle parental est souvent menée avec les parents lors des séances de guidance. L’objectif principal est…