Service public et droit communautaire

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SP et droit communautaire

Le droit communautaire (les traités Européens, le droit dérivé et la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes) a été construit sur la base de la doctrine économique libérale.
Le marché intérieur tente d’atteindre la satisfaction collective maximale enappliquant les principes de la libre concurrence : la transparence de l’information, l’atomicité des entreprises….
Ce principe de libre concurrence vaut au plan Européen tant pour les entreprises publiques que pour les entreprises privées.
Ce principe se trouve confronté à la spécificité Française.
En effet, la France a longtemps protégé ses entreprises publiques des règles de la concurrence. Selon saconception, le monopole d’Etat était le meilleur moyen de satisfaire l’intérêt général en raison des économies d’échelles réalisables.
Toutefois, la France considérée comme l’un des moteurs de la construction Européenne ne pouvait durablement méconnaitre les règles du droit communautaire de la concurrence.
De même, le droit communautaire n’appliquant que des principes dégagées par les Etats,ne pouvait être contraire, à priori à l’existence d’un Service public (CJCE 15 juillet 1964 Costa c/ ENEL).
C’est-à-dire que le droit communautaire ne pouvait ignorer les spécificités du service public à la Française.
Dès lors, l’interrogation porte à notre sens sur la possible conciliation entre le Droit communautaire et le SP au regard de ces orientations doctrinales différentes.
Il s’agiradonc pour nous à travers les critères d’identification du service public à la Française de déceler si le service public tel qu’il est pensé par le droit communautaire porte en lui des fondements du service public à la française (I).
Par la suite, nous analyserons les interactions existantes entre le droit communautaire et le service public à la Française (II).

I – le droit communautaire etle service public : Des fondements en apparences différents.
Il est généralement admis, en France, que le service public, est identifié à l’aide de trois critères : un critère matériel, l’intérêt général (A), un critère organique, la présence d’une personne publique, et un critère formel, la soumission à un régime exorbitant (B).
Or le droit communautaire, dans son objectif essentiellementéconomique, est en affrontement direct avec ces critères.
Il en va aussi bien de l’IG Européen, de même de la négation de principe des critères organiques et formel.

A – Un intérêt général européen résolument économique
La construction des Communautés européennes puis de l’Union européenne s’est faite dans un but avoué d’union économique de plusieurs Etats. Cette union économique reposantsur la concurrence et le marché.
L’intérêt général n’est pas ignoré, mais il doit être satisfait à travers la recherche d’intérêts particuliers. En fait, à l’instar d’Adam SMITH, pour les constructeurs de ce vaste marché, c’est la somme des satisfactions égoïstes qui doit permettre d’atteindre la satisfaction optimum. L’Etat se doit de jouer un rôle à la marge dans l’économie consistant à luttercontre les externalités négatives, les rentes de monopole et les abus de position dominante. Il a une fonction allocatrice, redistributive et stabilisatrice.
La notion française d’intérêt général est vaste, évolutive englobant à la fois des dimensions économique, politique, sociale. Cette vision de l’intérêt général révèle une conception volontariste. En vertu de cette conception l’intérêtgénéral transcende les intérêts particuliers, il est l’expression de la volonté générale. En cela, il fournit l’unité du groupe et est donc un élément essentiel de la cohésion sociale.
Une telle conception aurait du mal à s’accorder avec le droit communautaire qui, tout au contraire, valorise l’intérêt économique, la recherche du profit et de la productivité comme gages d’un meilleur agencement…