Publié en 1967, Un sale type est peut-être le roman le plus connu de Stanley Elkin, l’un des écrivains américains les plus injustement négligés de ce côté-ci de l’Atlantique et pourtant l’un des plusestimés de ses pairs.
D’Elkin, on a dit qu’il avait du Céline en lui, ce qui n’est pas si évident, un soupçon de Faulkner (ce qui est plus juste), qu’il était l’écrivain préféré de William Gass,révéré par Pynchon et par quelques autres ténors de la littérature américaine, ce qui est très vraisemblable. Ce ne sont pas les prix (il a reçu 2 fois le National Book Critics Award en 1982 et 1995,l’année de sa mort) qui auront aidé à vendre ses livres : Elkin était avant tout un professeur pour ceux qui le connaissaient puisqu’il enseignait les lettres à l’université de Washington où il résidapendant plus de trente ans. Ceux qui liront Un sale type se demanderont tout de même comment on n’a pu aussi longtemps passer à côté de cet écrivain là, tant le livre est saisissant et singulier.L’histoire tient en quelques mots : un commerçant juif (patron d’un grand magasin qui tourne plus que bien) est mis en prison pour une magouille semble-t-il anodine et qu’il n’a pas commise. Il en profitepour raconter sa vie et décrire jour après jour sa vie en prison. Sur ce lancement assez simple, Elkin, dont c’ets là le second roman, réussit un tour de force incroyable dont la moindre réussite n’estpas de nous rendre sympathique son héros Léo Feldman, un homme qui est tout à la fois un père irresponsable, un mari cruel, un ami peu fiable, un patron tyrannique et surtout un commerçant compulsifprêt à vendre tout ce qui se vend.
Le roman prend une dimension quasi fantastique lorsque Léo Feldman parle de la prison et de son duel surréaliste avec le directeur, personnage dont il est finalementle plus proche. Feldman est aux prises avec une organisation kafkaïenne mise en place pour contrôler l’expression individuelle et faire ressentir aux détenus le poids de leurs fautes supposées….