posent les contacts de langues au sein de sociétés plurilingues : ces questions
concernent par exemple la nature conflictuelle de tels contacts, les
représentations et les attitudes susceptibles de peser sur le fonctionnement
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social plurilingue, l’émergence de systèmes linguistiques hybrides (pidgins,
créoles), la mort des langues, la gestion politique dela diversité linguistique,
etc.
“ La pérennité, et hélas la violence des conflits linguistiques
montrent combien le linguistique et le social interfèrent ” (Ibidem, p.
98)
Dans ce chapitre dont le seul but est d’esquisser la problématique du
fonctionnement social du langage, nous n’aborderons toutefois que le premier
champ d’investigation : celui des variations sociales du langage.Racines et berceau de la sociolinguistique :
La sociolinguistique “ a émergé de la critique salutaire d’une certaine
linguistique structurale enfermée dans une interprétation doctrinaire du Cours
de linguistique générale de Ferdinand de Saussure ” (Boyer, 2001, p.7), et on
peut dater cette naissance au début des années 1960 (on notera que cela
correspond à la naissance de la Pragmatique, voirci-dessus)
Nous avons vu qu’avec F. de Saussure, la linguistique générale a gagné son
autonomie en tant que science spécifique. Elle n’y est toutefois parvenue qu’au
prix d’un réductionnisme considérable, ne s’intéressant qu’au fonctionnement de
la “ langue ” (envisagée comme un système de signes) et abandonnant l’étude de
la “ parole ” aux psychologues, aux philosophes ou aux sociologues. Avantque
n’apparaissent les premiers travaux de la Pragmatique, cette linguistique a
exclu de son étude les situations réelles d’échanges verbaux. Nous avons vu
combien cette linguistique a sur-simplifié la question de la signification ou du
sens, en la subordonnant aux explications du fonctionnement de la langue.
Jusqu’il y a à peine 35 ans, tout semble s’être passé comme s’il fallait
clairementdissocier l’étude du fonctionnement des éléments linguistiques de
l’étude des fonctions du langage. Cette priorité accordée à la langue (plutôt qu’à
la parole), ou à la compétence (plutôt qu’à la performance) ira même jusqu’à
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engendrer un curieux personnage, générique, mais inexistant : le
“ locuteur/auditeur idéal ”.
“ La dichotomie saussurienne entrelangue et parole renvoie la
variabilité hors des limites du système, seul descriptible, seul digne
de l’attention du linguiste. Le champ du sujet parlant et de la
modification permanente des usages est reconnu existant, mais c’est
un champ hors les murs. La science [= la linguistique “ proprement ”
dite] fonde son objet en s’abstrayant du réel non homogène . . . ”
(Lafont, 1983, p.11).
Encontestant la validité d’un structuralisme réducteur (qui ne s’intéresse
qu’à la langue proprement dite, envisagée comme système homogène), la
sociolinguistique invite à un autre regard sur le langage, ouvrant la porte à “ un
structuralisme de la diversité, de la variation ” qui sont des dimensions
incontournables de la parole (Boyer, 2001, p.11).
9.2 L’analyse des différences sociales delangage.
Comme le rappelle Espéret (1987, p.330-343), on peut distinguer trois
grandes approches dans l’analyse des différences sociales de langage :
(a) l’étude des différences d’aptitude verbale entre milieux sociaux .
(b) l’étude des différences sociales dans les processus de construction
et de fonctionnement du langage.
(c) l’étude de langages spécifiques à divers groupes sociaux.
Il y a biensûr des interactions entre les questions dont traitent ces diverses
approches . Toutefois, seule la troisième approche nous semble véritablement
correspondre au “ core business ” de la sociolinguistique, les deux autres
relevant davantage d’une Psychologie différentielle du langage (raison pour
laquelle nous ne ferons ici qu’en esquisser la problématique générale).
Différences d’aptitude…