Zola

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Zola est l’homme d’une somme romanesque de vingt volumes : Les Rougon-Macquart, Histoire naturelle et sociale d’une famille sous le Second Empire. Ces romans illustrent son but naturaliste.
Pour expliquer la doctrine naturaliste, lisons ces lignes de Zola, extraites du Roman expérimental . Malgré son titre, Le roman expérimental, publié en 1880, n’est pas un roman mais uneétude théorique qui définit les caractéristiques du roman naturaliste. Zola présente le travail du romancier en des termes scientifiques et emprunte aux médecins leurs méthodes d’expérimentation. Observer les faits puis les expérimenter dans le cadre de l’existence humaine, sur les plans héréditaire, physiologique et social, telle est la tâche du romancier naturaliste pour comprendre les comportementsde l’homme dans la société.

|Notre héros n’est plus le pur esprit, l’homme abstrait du XVIIIe siècle, il est le sujet physiologique de notre science actuelle, un |
|être qui est composé d’organes et qui trempe dans un milieu dont il est pénétré à chaque heure. |
|Le roman expérimental [c’est] : posséder le mécanisme des phénomènes chezl’homme, montrer les rouages des manifestations |
|intellectuelles et sensuelles telles que la physiologie nous l’expliquera, sous les influences de l’hérédité et des circonstances |
|ambiantes, puis montrer l’homme vivant dans le milieu social qu’il a produit lui-même, qu’il modifie tous les jours, et au sein duquel |
|il éprouve à son tour une transformation continue.|
|J’estime que la question de l’hérédité a une grande influence dans les manifestations intellectuelles et passionnelles de l’homme. Je |
|donne aussi une importance considérable au milieu. |

L’hérédité est la pierre angulairedes Rougon-Macquart.
Passionné par sa lecture du Traité philosophique et physiologique de l’hérédité naturelle du Dr Prosper Lucas (1850), Zola y vit une confirmation de ses conceptions déterministes de l’espèce humaine et l’occasion de composer une Comédie humaine inédite.

Je veux montrer comment une famille, un petit groupe d’êtres, se comporte dans une société, en s’épanouissant pourdonner naissance à dix, à vingt individus, qui paraissent, au premier coup d’œil, profondément dissemblables, mais que l’analyse montre intimement liés les uns aux autres. L’hérédité a ses lois, comme la pesanteur.
Je tâcherai de trouver et de suivre, en résolvant la double question des tempéraments et des milieux, le fil qui conduit mathématiquement d’un homme à un autre homme. Et quand jetiendrai tous les fils, quand j’aurai entre les mains tout un groupe social, je ferai voir ce groupe à l’œuvre, comme acteur d’une époque historique, je le créerai agissant dans la complexité de ses efforts, j’analyserai à la fois la somme de volonté de chacun de ses membres et la poussée générale de l’ensemble.
Les Rougon-Macquart, le groupe, la famille que je me propose d’étudier, a pourcaractéristique le débordement des appétits, le large soulèvement de notre âge, qui se rue aux
jouissances. Physiologiquement, ils sont la lente succession des accidents nerveux et sanguins qui se déclarent dans une race, à la suite d’une première lésion organique, et qui déterminent, selon les milieux, chez chacun des individus de cette race, les sentiments, les désirs, les passions, toutes lesmanifestations humaines, naturelles et instinctives, dont les produits prennent les noms convenus de vertus et de vices. Historiquement, ils partent du peuple, ils s’irradient dans toute la société contemporaine, ils montent à toutes les situations, par cette impulsion essentiellement moderne que reçoivent les basses classes en marche à travers le corps social, et ils racontent ainsi le second empire,…