Introduction
Depuis l’arrêt du Conseil d’Etat « Blanco », de 1873, la responsabilité de l’administration ne peut « être régie par les principes qui sont établis dans le Code civil pour les rapports de particuliers à particuliers » : la responsabilité administrative doit être spécifique. La responsabilité de l’administration ou de ses agents peut être engagée de deux manières différentes.Normalement, une activité de service public engage la responsabilité administrative si elle est fautive. C’est la responsabilité pour faute. Dans certains cas, cette responsabilité peut être engagée même sans faute. La faute a été définie très tôt par Planiol comme étant « un manquement à une obligation préexistante ». En matière administrative, elle désigne donc tout défaut de fonctionnement des servicespublics de nature à engager la responsabilité pécuniaire de l’administration à l’égard des administrés.
Nous pouvons ainsi nous interroger sur l’évolution et l’intérêt de cette notion dans la responsabilité de l’administration. En d’autre terme sur le rôle joué par celle-ci dans la responsabilité de la puissance pulique.
Pour répondre à cette question, nous analyserons en premier lieu dansquelle mesure la faute est déterminante de la responsabilité administrative, et puis en second lieu nous montrerons que l’on tend vers la disparition de la condition de faute dans la responsabilité administrative.
I- Une responsabilité traditionnelle basée sur la faute
A- La nature de la faute : distinction faute personnelle, faute de service
L’engagement de la responsabilité pour faute posele problème de la détermination de la personne responsable : l’administration personne morale agit nécessairement par l’intermédiaire de l’un de ses agents personne physique, dès lors l’engagement de la responsabilité de l’administration sera subordonné à une faute commise par un agent dans l’exercice de ses fonctions. Pour ce faire la jurisprudence a posé le principe de la distinction de la fautede service engageant la responsabilité de l’administration et la faute personnelle engageant la responsabilité de l’agent.
1- La « garantie des fonctionnaires »
La responsabilité des agents publics sera considérée par les révolutionnaires comme une indispensable précaution contre la tyrannie et l’arbitraire.
La loi des 16-24 août 1790 interdit en effet aux juges de poursuivre ces agents pourdes faits relatifs à leurs fonctions, « aucun administrateur, ne peut être traduit devant les tribunaux pour raison de ses fonctions, à moins qu’il n’y ait été envoyé par l’autorité supérieure conformément aux lois » (article 2 de la loi des 7-14 octobre 1790).
2- Faute personnelle, faute de service : l’arrêt Pelletier (TC 30 juillet 1873)
Le décret du 19 septembre 1870 pris par le gouvernementde défense national, crut abolir la « garantie des fonctionnaires » en suppriment l’autorisation préalable du Conseil d’Etat et en renvoyant devant les tribunaux judiciaires le contentieux des fautes commises par les agents publics dans l’exercice de leurs fonctions. Dans un arrêt Pelletier en date du 30 juillet 1873 et au terme d’un raisonnement très constructif, le Tribunal des conflitsdistinguait entre deux catégories de fautes, la faute personnelle et la faute de service.
La faute personnelle de l’agent public engage sa propre responsabilité devant le juge judiciaire, sans qu’il soit désormais besoin de l’autorisation du Conseil d’Etat. Cette « garantie » à pu être révoquée sans inconvénient pour le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires, dès lors quela faute personnelle est conçue comme une faute détachable du service.
La faute de service met en jeu la responsabilité de l’administration elle-même devant le juge administratif. Cette compétence, nullement évoquée dans le décret du 19 septembre 1870, est présenté comme la conséquence du principe de séparation, dès lors que la faute de service ne peut-être détachée du service, et suppose de…