Liberté et sécurité

Liberté et sécurité

En 1875, George Bizet présente à Paris l’opéra Carmen qui deviendra l’un des plus représentés au monde. L’héroïne éponyme, une bohémienne séductrice, sans attaches, y donne sa conception de la liberté : « Ce que je veux, dit-elle, c’est être libre et faire ce qui me plait ».
Il semblerait donc que la liberté de l’homme soit cette possibilité d’agir selon sa proprevolonté, sans entraves extérieures. Cela rejoint ainsi la définition de la liberté comme l’état de l’homme qui n’est pas soumis à la servitude. La liberté serait donc à la fois liberté physique, le pouvoir agir, et liberté mentale, le pouvoir vouloir.
Cependant, les lois qui gouvernent chaque Etat instaurent des limites puisque le citoyen ne peut dès lors agir uniquement comme il l’entend. Ces lois, engarantissant notamment la sécurité, paraissent donc empêcher l’expression de la liberté de l’homme. Ainsi, les mesures de sécurité mises en place par les Etats pour prévenir l’attaque de leur territoire empêchent les individus de circuler librement.
La liberté et la sécurité seraient donc en contradiction, l’une limitant l’autre et inversement. Toutefois, il semble aussi que le sentiment desécurité participe au bien-être de chacun. En effet, l’homme est constamment assailli par l’inquiétude du lendemain et la sécurité apaise cette crainte.
Il s’agit donc d’examiner si la conciliation entre liberté et sécurité, deux états qui paraissent nécessaires à l’épanouissement de l’individu, contient réellement une contradiction.
Les définitions des concepts de liberté et de sécurité sont-ellesunivoques ? La liberté est-elle à mettre sur le même plan que la sécurité ? Que recherche l’homme à travers la quête d’un équilibre entre sécurité et liberté ?

Il s’agit donc tout d’abord de définir ces deux notions complexes que constituent liberté et sécurité.

La liberté s’exécute dans l’action. Ainsi, l’individu qui agit selon sa volonté, sa fantaisie ou sa nature (le chat qui chasse lasouris par instinct) est considéré comme libre. Hannah Arendt dit d’ailleurs dans La crise de la culture : « être libre et agir ne font qu’un ». C’est pourquoi la liberté peut se décliner sous de multiples formes. D’ailleurs, on ne parle souvent pas de la liberté mais au contraire des libertés : liberté de circulation, liberté d’opinion, liberté religieuse, liberté civile etc. … En fait, laliberté est relative à un existant qui est causa sui, c’est à dire sa propre cause. René Descartes, dans une lettre du 7 mai 1641, met en exergue le caractère indépendant de la liberté qui consiste « ou dans une grande facilité que l’on a à se déterminer, ou dans le grand usage de cette puissance positive que nous avons de suivre le pire encore que nous connaissons le meilleur ». Il met donc en lumièrela qualité humaine de la liberté. En effet, l’homme, qui sait juger du bien et du mal, peut choisir de faire le mal en connaissance de cause. Il exprime ainsi sa liberté, contrairement à l’animal qui n’a aucune idée du partage entre bien et mal. Par sa nature, l’homme serait donc libre. C’est pourquoi, il n’est pas étonnant que la liberté ait été érigée en droit naturel dans la Déclaration desdroits de l’homme et du citoyen de 1789. A travers ce texte, les philosophes des Lumières ont vigoureusement remis en question la société d’Ancien Régime fondamentalement inégale. Ainsi au nom de la sécurité du pays, la noblesse avait pour interdiction de travailler afin de mieux défendre le territoire français en cas de guerre. La noblesse n’était donc pas imposable et pouvait même prélever unimpôt sur son domaine. Au contraire, les paysans du Tiers-Etat, représentant quatre-vingt-dix pour cent de la population, étaient sous la domination du seigneur, pour lequel ils devaient cultiver les terres. Cet exemple montre donc l’apparente contradiction entre sécurité et liberté.
La sécurité se définit de deux façons. Il peut tout d’abord s’agir de la situation dans laquelle quelqu’un ou…