Luceafarul

Mihai EminescuLUCEAF?RULversiune francez? de George Pruteanu (1970) |

Il était une fois, jadis,Jadis, il y a longtemps,Une fille des rois, des plus grands rois,Une fille comme le printemps.Ellle était seule à ses parentsEt belle parmi les belles,Comme la Vierge parmi les saints,La Lune sur le ciel.Dans l’ombre imposante des voûtes Elle marche lentement Vers la fenêtre où, toujours,Hypérion attend,Elle regarde comme il brille Dans les hauteurs lointaines : Sur le chemins toujours mouvants Des vaisseaux noirs il mène.Aujourd’hui vu, demain revu – Et le désir se lie; Hypérion aussi, il tombe Amoureaux de la fille.La tête aux mains, elle rêve et rêve, Et agrandit sa peine… Ainsi, rêvant toujours, de lui Sa tête, son âme sont pleines.Et le voilà comme il scintille Dans toutesles nuits de fête Vers l’ombre du château brumeux Quand elle va lui paraître.Et pas à pas, en la suivant, Dans la chambre il glisse… De ses reflets froids et glacés Une fine toile se tisse.Et quand la nuit, le doux sommeil Embrasse la rosière, Il lui caresse les belles mains, Il baise ses paupières.Et du miroir, une étincelleSur son corps s’éparpille,Sur ses grands yeux, tout frémissants,Sur sonvisage de fille.Elle le contemple en souriant,Dans le miroir il tremble,Car il la suit dans tous ses rêves…- Leurs âmes sont ensemble.Elle, lui parlant dans le sommeil, Soupire de sa peine :- « Ô ! le Seigneur de toutes mes nuits !Il est si loin ! Qu’il vienne !Descends vers moi, Hypérion,Sur tes rayons qui brillent,Viens dans mon coeur, viens dans mon âme,Viens éclairer ma vie! »Il l’écoutaittout en tremblant, Et son éclat s’allonge; Puis, comme un grand éclair s’élance Et dans la mer il plonge.Dans l’eau où il était tombé Des tourbillons immergent, Et des abîmes inconnus Un beau jeune homme émerge. Dans un instant il est déjà Au seuil de la fenêtre – Un sceptre aux mains -, et, doucement,Dans la chambre il pénètre.Il était comme un voïvode, Et ses cheveux l’auréolent; Un blême linceul,tout déroulé, Lui couvre les épaules.Et l’ombre du visage livide Est pâle comme la cire – Un mort superbe aux yeux vivants Qui ne savent que luire.- « À ton appel j’ai réponduEt j’ai quitté ma sphère.Ma mère est la Voûte du Ciel, Et l’Océan – mon père.Pour que je vienne auprès de toi Et de ta voix profonde, J’ai descendu du ciel serein Et je naquis des ondes.Oh ! viens, trésor ! Laisse ce mondePour que tu sois la mienne; Je suis Hypérion, et toi, Toi, tu seras ma Reine.Viens avec moi, tous mes palais Seront, ma belle, à toi ! Les êtres, tous, de l’océan Vont écouter ta voix. »- « O ! tu es beau comme dans les rêves Les anges me hantaient… Mais sur la voie que tu me frayes Je ne viendrai jamais.Tu n’es pour moi qu’un étranger Qui, sans vivre, scintille; Je suis vivante — tu es mort, Tesyeux me pétrifient. » *Les jours s’en vont, les nuits aussi… Hypérion revint, Luisant toujours, sur le ciel noir. De ses rayons sereins.Pendant la nuit, dans le sommeil, Elle rêve et se rappelle Son beau Seigneur, et, sans vouloir, De tout son coeur l’appelle :- « Descends vers moi, Hypérion,Sur tes raies qui scintillent,Viens dans mon coeur, viens dans mon âme,Viens éclairer mavie ! »Lui, dans le ciel, l’entend; commence À s’éteindre de peine… Et là où il a disparu Tournoie la voûte sereine.Dans l’air, des flammes rouges s’envolentPareilles aux météores,Et des abîmes du chaosUn beau visage prend corps.Sur les cheveux noirs comme la Nuit Sa couronne est brûlante; Il plane, environné de flammes Enormes, éblouissantes.De son linceul sortent, comme des ailles Ses mainsmonumentales; Il vient pensif et désolé Et son visage est pâle.Ses yeux miraculeux et grands Ont une lumière funèbre, Comme deux passions détruisantes Et pleines de ténèbres.- « À ton appel j’ai répondu Et j’ai quitté ma sphère. Mon père est le Soleil du Jour Et c’est la Nuit ma mère. | Oh! viens, trésor ! Laisse ce monde Pour que tu sois la mienne; Je suis Hypérion, et toi, Toi, tu seras ma…