Question sur le corpus +méthode

La question sur corpus – Méthode

I. CORPUS SERVANT D’EXEMPLE

A. JONATHAN SWIFT : LES VOYAGES DE GULLIVER (1726)
Le marin anglais Gulliver, narrateur du livre, s’est échoué à Brobdingnag, une terre peuplée de géants. Il s’entretient avec le roi et se propose de lui révéler le secret de la poudre explosive, inconnu dans ce pays.

Je lui dis qu’une quantité de cette poudre étant mise dansun tube de bronze ou de fer, selon sa grosseur, poussait une balle de plomb ou un boulet de fer avec une si grande violence et tant de vitesse, que rien n’était capable de soutenir sa force ; que les boulets ainsi poussés et chassés d’un tube de fonte par l’inflammation de cette petite poudre, rompaient renversaient, culbutaient les bataillons et les escadrons, abattaient les plus fortesmurailles, faisaient sauter les plus grosses tours, coulaient à fond les plus gros vaisseaux ; que cette poudre, mise dans un globe de fer lancé avec une machine, brûlait et écrasait les maisons, et jetait de tous côtés des éclats qui foudroyaient tout ce qui se rencontrait ; que je savais la composition de cette poudre merveilleuse, où il n’entrait que des choses communes et à bon marché ; et que jepourrais apprendre à ses sujets, si Sa Majesté le voulait, la manière de construire ces tubes dans la dimension proportionnée à toutes les autres choses dans le royaume ; et que les plus grands ne devraient pas avoir plus de cents pieds. Vingt ou trente de ces tubes chargés convenablement renverseraient, lui dis-je, les murailles de la plus forte ville de son royaume, si elle se soulevait jamais etosait lui résister ; et détruiraient même la capitale en quelques heures, si elle prétendait se soustraire à son pouvoir absolu. Je lui offris humblement ce petit présent comme un léger tribu de ma reconnaissance. Le roi fut saisi d’horreur à la description que je lui dis de ces terribles machines, et à la proposition dont je l’accompagnai. Il était confondu de voir un insecte impuissant etrampant (ce sont ses propres termes) parler avec autant de légèreté des scènes de désolation produites par ces inventions destructives. Il fallait, disait-il, que ce fût un mauvais génie, ennemi de Dieu et de ses ouvrages, qui en eut été l’auteur. Il protesta que, quoique rien ne lui fît plus de plaisir que les nouvelles découvertes, soit dans la nature, soit dans les arts, il aimerait mieux perdre sacouronne que de faire usage d’un si funeste secret, dont il me défendit, sous peine de la vie, de faire part à aucun de ses sujets. Etrange effet des vues et des principes bornés d’un prince orné de toutes les qualités qui peuvent gagner la vénération, l’amour et l’estime des peuples. Ce prince sage, éclairé, plein de talents admirables, et presque adoré de sa nation, sottement gêné par unscrupule bizarre, dont

Boudier Aurélien – 1ère S – Page 1

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nous n’avons jamais eu l’idée en Europe, laisse échapper l’occasion qu’on lui met entre les mains de se rendre le maître absolu de la vie, de la liberté et des biens de tous ses sujets!

B. VOLTAIRE : AVENTURE INDIENNE (1766)
Pythagore1 dans son séjour aux Indes, apprit, comme tout le monde sait, àl’école des gymnosophistes, le langage des bêtes et celui des plantes. Se promenant un jour dans une prairie assez près du rivage de la mer, il entendit ces paroles: « Que je suis malheureuse d’être née herbe ! à peine suis-je parvenue à deux pouces de hauteur que voilà un monstre dévorant, un animal horrible, qui me foule sous ses larges pieds; sa gueule est armée d’une rangée de fauxtranchantes, avec laquelle il me coupe, me déchire et m’engloutit. Les hommes nomment ce monstre un mouton. Je ne crois pas qu’il y ait au monde une plus abominable créature. » Pythagore avança quelques pas; il trouve une huître qui bâillait sur un petit rocher; il n’avait point encore embrassé cette admirable loi par laquelle il est défendu de manger les animaux nos semblables. Il allait avaler l’huître,…